Keboemen
13 mai 1935
Oui, c’est
vraiment le 13 aujourd’hui pour la
maîtresse de maison Woldringh. Un 13 mêlé, car du plaisir elle en a aussi eu.
Elle vient de recevoir un gentil petit paquet avec un beau soulier bleu marin qui lui va comme un gant et un bas qui
n’est pas mal du tout, quant à la couleur. J’en ai beaucoup de plaisir, et te
remercie de tout cœur. Je ne sais pas si ce soulier vient de Banely ou si c’est
un cadeau de toi, enfin mes chaleureux remerciements à qui ils reviennent. J’en
suis excessivement contente, car ces sortes de souliers sont très chers ici. De
recevoir ce paquet m’a un peu adouci mes misères de la matinée.
Ecoutez
donc : d’abord en inspectant la lessive de hier, j’ai trouvé des pièces mal
repassées qu’il a fallu retourner. Ensuite les nouvelles pincettes m’ont
taché tout ce qu’elles ont touché, et principalement les pantalons et
vestons de Mr. Elout. J’arrive à la cuisine, la baboe vient me dire qu’elle
avait laissé tomber le fer à repasser, il est cassé et plus
raccommodable, il y avait 10 jours que je l’ai acheté. Ensuite elle me montre
une paire de pantalons de Buby, les derniers neufs cela va de soi, une chemise,
et des caleçons de dessous de Mr. Elout, qu’elle a simplement laissé « brûler »
en les cuisant un peu !!! Elle a essayé d’abord de faire partir les
taches, avec cela elle a perdu un temps fou et maintenant elle est en retard
une heure pour son dîner. Les hommes attendent, ils baillent, ils ont
faim et ne peuvent pas manger. J’ai bien été aider à la cuisine, et en revenant
dans la voorgalery j’ai taché tout le tapis ayant du charbon à mes
semelles !!! quel jour, nom d’une pipe. J’ai aussi trop eu
d’épinards ! et je n’ai pas d’entremets ! Oh lalala, Zut, dans la vie
faut pas s’en faire, mais c’est embêtant tout de même.
Vous
savez, je n’arrive pas à vous en écrire long cette fois-ci. Toutes mes matinées
se passent à la cuisine, au ménage quoi. Il ne faut pas m’en vouloir, mais je
ne suis pas disposée à écrire aujourd’hui et serai contente quand, ce soir, je
me mettrai à ronfler à la rencontre du 14 !
Samedi
soir nous avons eu les Visser à bridger, et hier soir nous avons écouté le match Hollande – Belgique, 2 – 0, les trois assis en pyjamas autour du radio. Nous
avons soupé à 11 ½ heures. Le matin Mr. Elout est allé chez les Visser, Buby
l’a suivi et la conséquence a été qu’ils sont restés à bridger de nouveau
jusqu’à 2 ½ heures de l’après midi. Je les avais rejoint à 1 heure, et nous
sommes enfin rentrés pour manger à 3 heures.. Les trois hommes ont énormément
bu, toujours du Bols (alcohol fort hollandais), à la fin ils
se sont mis à lutter et Buby a presque démis le bras de Mr. Elout avec un coup
de jiujitsu. Vendredi soir, Mr. Elout a soupé chez les Visser, alors Mr. Visser
a voulu embêter son chien et lui a enlevé l’os que ce dernier rongeait. Le
chien est devenu furieux et a mordu Visser à 20 places différentes, et dans la
lutte corps à corps, Mr. Visser est tombé sur des cailloux et s’est blessé à la
tête. Oh, je vous dis, cela a été toute une histoire. Nous étions déjà au lit,
mais en entendant crier Mme Visser, j’ai vite été à la fenêtre et j’ai vu toute
la lutte. C’est déjà la troisième fois que cela leur arrive.
J’ai mis
ma robe de Hedy ce soir, alors la Rickshaw, cette chère enfant, a lâché son
chien pour qu’il vienne devant notre jardin et elle l’a suivi. J’ai voulu
entamer une petite conversation avec, faisant les semblants de ne pas deviner
son manège, mais quand elle a eu un bon coup d’œil rinceur, cela lui a coupé la
parole. Il y avait justement un colporteur qui me faisait la scie, un blanc,
avec les cheveux rouges et un nez juif, je lui ai acheté des lames de rasoir,
et pendant que j’étais occupée avec lui, la Rickshaw, s’est retirée dans son
jardin, où elle va digérer sa petite jalousie. Bon, voilà les hommes qui
reviennent.
Bon sang,
ma lettre ne contient pas beaucoup d’intéressant ni de nouvelles, mais cette
semaine il ne s’est rien passé de spécial les jours ont filés je me suis
débattue avec les dîners à cuire. Oui, j’ai commencé de me couper une robe de
crêpe de chine noire, pour toutes les occasions. Je la fais toute simple, je la
porterai une fois avec le capeli en dentelles reçu de Hedy, et une autre fois
avec le beau nœud en satin changeant jaune-orange de ma vieille robe de bal. Ce
nœud, je le piquerai aux côtés comme une des robes de la princesse Marina (de Kent) que j‘ai vue dans le Sketch.
Avec le reste de ma robe en tull, je vais me faire un grand cape. Je garderai
les volants les uns sur les autres, tels que Hedy les avait mis sur la robe. Tu
vois ce que cela donnera, pas ? Ainsi je pourrai une fois bien employer cette toilette monstrueuse qui prend
tant de place dans mon buffet.
A toi
aussi, mon Faaatherli, je voulais écrire spécialement, mais je n’y arrive plus.
Merci pour tes lettres que j’aime toujours tant. A ce que je vois Brero reste
donc à Lattrigen ? Il ne part pas dans le canton de Berne, quelque part
comme maman l’avait écrit ?
Oui, je crois que tu n’as pas été sans apprendre une petite leçon avec
lui, profites-en, hein ? Dis, tu donneras mes amitiés à Mottet, il y a si
longtemps que je lui dois une lettre.
Des photos
vous en aurez. Que vous preniez la loupe pour étudier cette sale g…le, je ne
puis pas le comprendre, est-ce donc si intéressant que cela ? Enfin, c’est
une raison de plus pour que je me fasse bien photographier une fois, car vous
méritez bien de voir ma binette heureuse. Seulement n’oubliez pas que je ne
suis pas photogénique et que 9 fois sur 10 je ne serai pas réussie. Les photos
vous parviendront par prochain courrier, car elles n’ont pas pu être terminées
pour aujourd’hui.
J’envoie
ce jour une deuxième série de cartes postales de Keboemen, par bateau. La
prochaine fois, ce sera le tour à
tes timbres. Le mois passé on a perdu pour Fl. 5.50 de timbres, achetés pour
notre courrier, de sorte qu’il a fallu compter un peu !!!
Toujours
votre vieille Ge….. et son Oscarli
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