lundi 30 novembre 2015




15 juillet 1934

Keboemen

Avant tout merci pour votre lettre du 3 juillet.
Nous sommes de nouveau une fois à dimanche matin. Il est 11 heures. Buby a été travailler ce matin comme d’habitude, pendant ce temps j’ai vite fait un cake pour notre dessert, ensuite il est rentré déjeuner, est retourné travailler et maintenant il est assis à son bureau, ayant pris son travail à la maison. J’aime bien cela, il fait beau être ensemble, même si l’on ne se dit pas un mot.
Moi, votre Ge… je suis assise dans un fauteuil, dans une robe neuve, achevée hier au soir, et j’ai mon Hermes cheibli (petit diable, machine à écrire) sur les genoux, très confortable et heimelig. Ma robe aussi me fait plaisir, elle est bien réussie, quoique cousue comme une cochonne. Je l’ai commencée avec beaucoup de soin et la ferme résolution de la coudre soigneusement, mais à moitié chemin, ma patience était à bout et je l’ai cousue comme-ci comme cela, mais nom d’une pipe, la coupe y est, elle tombe bien, y a rien à dire, alors pour moi c’est le principal. 
le chic!

Oscar va en faire une photo tantôt avec les petits chiens, je viens d’envoyer le kebon acheter un film. Je t’enverrai un échantillon de ma robe, mamali, elle est bon marché, tu sais, elle coûte Frs. 6.40, soit Fl.3.20. C’est du tootisha japonais, les dessins sont bien jolis, mais la qualité laisse beaucoup à désirer. Pour le moment je m’en moque, car ainsi je n’ai pas peur de manquer la coupe etc. J’y vais avec sang froid, tandis que si c’était une étoffe chère, j’aurais encore un peu la frousse. A mes moulures je n’ose pas encore m’attaquer, je veux attendre d’avoir mon buste. Cette semaine je dois me mettre une fois de plus à mon panier de raccommodage. Je me suis fait un petit corset en tulle de coton, juste une large ceinture pour retenir mes bas, elle a bien réussi, et surtout elle ne donnera pas trop chaud, et elle se lave comme une chemise. Oh ! je suis pratique, y a pas !
Mes chers, maintenant encore une grande nouvelle. Hier nous avons eu la visite du voyageur de Fonteyn de Djocja, Fonteyn est un magasin de bijouterie, alors, alors, le type est d’abord venu de bon matin et la Röhwertje l’ayant vu en a profité pour aussi venir voir et j’ai fait dire à Madame Visser également. Ainsi toute ma matinée a été perdue. Le type ayant oublié une clef d’une de ses valises, est revenu vers 12 ½ heures. Oscar était à la maison alors nous avons regardé des pendentifs et, et, et la girl en a reçu un. Vous savez que j’avais encore Frs. 100.--  que papa W.  m’avait fait de cadeau avant de partir, avec le désir que je m’achète un bijou en souvenir de lui. Ce voyageur était déjà venu quelques fois avec sa collection, mais je n’y avais jamais rien trouvé de mon goût dans le prix. Hier donc, Buby étant là, nous avons trouvé un joli pendentif (Buby m’a promis d’en faire un dessin quand il aura le temps, je vous l’enverrai) en or blanc, très simple. Une aigue marine (tu te rappelle, mamali, la pierre qui nous plaisait tant à Zurich !) mon pendentif est donc de la même pierre, un bleu-vert magnifique, comme le fond du lac. C’est une pierre ovale au bout d’une baguette sertie de petites roses, avec un petit brillant au bout du haut, et une chainette très fine.
…..J’en étais là avec ma lettre quand le courrier est arrivé, le sea-mail, qui m’a fait un immense plaisir. Tatali, merci, merci pour les journaux de fin mars et du mois d’avril, ainsi que les Jardins des Modes, le Näbu (Nebelspalter, journal satirique) et le journal hollandais. Nous n’avons dîné qu’à une heure parce qu’avant il fallait les lire d’un bout à l’autre, les journaux. C’est fou ce qu’on les aime. J’ai aussi reçu le livret de « l’île de la paix », envoyé par Mottet, les Journaux du Jura et une longue et très belle et bonne lettre de Kitty avec les photos de son mariage. Oscar a simplement trouvé qu’ils avaient l’air plus bœufs que nous ne l’avons eu ! Mais revenons à nos moutons. Donc, mon pendentif est très joli, me plaît énormément, seulement il était plus cher que mes Fl. 50.--  alors Buby a ajouté le reste de sa poche comme cadeau d’anniversaire de mariage. Je vais me faire une robe bleu ciel avec cette pierre aigue-marine, l’effet sera très chic. Je vais aussi me faire une des toilettes dans Sie und Er, Tatali, je suis si contente d’avoir ces journaux, ici à l’étranger on les apprécie bien plus!
Mon caneton était excellent de nouveau, et mon cake bien réussi aussi. Cet après midi nous avons dormi et puis joué au tennis avec les Visser, c’était assez gai.
Il ne faut pas vous étonner si vous ne recevez pas de nouvelles de papa Woldringh. Il a été en Angleterre pour chercher une boarding school pour Bobby. Il est actuellement très très occupé et ne nous écrit presque rien non plus. Seulement quelques mots pour que nous ne nous fassions pas de soucis. De Coen (frère cadet d’Oscar) nous n’avons pas de nouvelles non plus.
Mamali, tu devrais rire si tu voyais un de mes petits tapis pour mes plateaux. Avant de partir, pour bourrer mes caisses, j’avais pris quelques chiffons, des pattes à poussière etc, dans l’armoire à linge. Parmi ceux-ci se trouvait un bout d’un vieux tablier de cuisine de toi, maintenant, ce bout est bien brodé, très gai avec du coton rouge et bleu et forme un joli napperon sur mon plateau noir que j’ai acheté à Amsterdam, tu te rappelles ? J’en ai déjà fait quelques un de ces petits napperons, toujours entre midi et une heure, en attendant qu’Oscar aille travailler, car je ne vais pas dormir avant qu’il soit parti. Ainsi à mes moments perdus je complète mon ménage.
Ce mois je tire le diable par la queue une fois de plus et pour changer. J’ai acheté 12 jolis motifs au fuseau à un chinois, 15 x 15 cm. Cela garni très joliment la table. Je les ai eu pour Fl. 1.50, ensuite la baboe m’a fait la meule pour des marmites, et j’ai fait recouvrir mes tables de cuisine de plaques de tôle, etc, etc. pour le reste, je ne sais pas, mais l’argent a filé et fondu.
Cette fois, je ne vous chroniquerai pas ma semaine, vu qu’il n’y a rien à dire. Je n’ai fait que coudre, coudre, m’amuser avec les petits chiens, qui déchirent tout ce qu’ils trouvent. Un après-midi j’ai laissé ma robe sur la chaise longue dans ma chambre de travail, pendant que je dormais, ils n’ont pas trouvé mieux que d’aller pisser dessus. J’ai dû la faire sécher avant de pouvoir continuer. Le lendemain, Topsy assis sous ma chaise pendant que je travaillais, attrape un bout de robe entre ses dents et le mâchait avec grand appétit. Ce soir en voulant enfiler mon pyjama, je ne trouve plus de manche, elle pendillait encore à un fil, en loques. Ils me tiennent sur le qui-vive toute la journée, ces chiens, mais ils sont drôles tout de même. Ainsi la semaine a passé je ne sais comment.

la croix du sud
(cliquez pour aggrandir)

Hier soir après souper, nous avons été faire quelques pas sur le tennis pour tâcher d’étudier les étoiles un peu. C’est fou le beau ciel qu’on a ici, la nuit. Est-ce que je vous ai déjà raconté qu’au sud nous voyons la croix du sud, et du côté nord de la maison je vois la grande ourse, mais elle se tient sur la tête avec la queue pointant vers le zénith. Vous savez que cela a toujours été mon étoile, la grande ourse. A Sutz je la voyais toujours depuis mon lit au-dessus de la montagne.
la grande ourse

C’est le temps des serpents maintenant. Chez Röhwer, ils en ont tué un dans le boudoir de madame, et Buby au bureau en a déjà eu deux, dont un derrière le bureau de M. Visser. Il fait maintenant souvent un vent* (*souffle, pardon !) très fort souvent et très froid, il faut faire attention. C’est comme en automne et on aime à se trouver chez soi, dans sa maison, bien confortable. Où il fait encore le plus beau c’est au lit, sous tes couvertures, charrette, ce qu’on les apprécie. Pour la saison prochaine, tu pourras me refaire un figaröttli (liseuse), si tu as le temps et si cela te fait plaisir, tu sais un blanc, très souple et mince pour mettre au lit. Tu pourras y penser cet hiver, pas ?
Merci  bien pour l’inventaire (voir lettre 26.11.33). C’est trop tard maintenant, mais on le conserve tout de même comme pièce à l’appui, cela aura toujours une certaine valeur, toutefois, j’aime mieux ne pas avoir besoin d’en faire usage.
Je voulais me remettre à ma correspondance cette semaine, quand le raccommodage serait terminé, mais maintenant il me faudra refaire un pyjama.
Donne-moi la nouvelle adresse des St Gallois, Tata est certainement en train de faire de l’ordre, déménager et re-enménager. Vous ferez des photos, j’aimerais bien voir ce nouvel appartement.
Et maintenant fini terminé.
Votre Ge…



jeudi 26 novembre 2015






9 juillet 1934

Keboemen


Mynes Mamms
Merci tellement pour ta chère lettre.
Je vois que tu as de nouveau beaucoup de visites, ma pauvre, mais pour l’amour ne te fatigue pas trop de nouveau, pense à toi et à moi. Je suis sûre que tu ne trouves même plus le temps d’aller te reposer entre midi et une heure. Stpl. Ne te fends pas en quatre pour Brero, il n’en vaut pas la peine. La Fridy est bien gentille et je suis contente qu’elle soit près de toi, mais je serai aussi contente quand ils iront demeurer à part, car comme je te connais, c’est toi qui feras encore le gros travail, c’est toujours sur toi que tout retombe. Bien sûr, tu n’as plus besoin d’inviter Flock. Je l’aime bien, Flock, mais tout de même, toi, tu passes avant tout. Donc, ne prends plus aucune considération, fais tout à fait comme tu veux. Ce que tu me dis des garçons me fait assez de peine, mais c’était à prévoir. Je vais écrire à Charlot de nouveau, il a besoin qu’on le supporte, mais sois tranquille, je ne laisserai jamais rien deviner de ce que tu m’écris à ce sujet.
Est-ce que la Hanny va se marier maintenant une fois ? Quant à Mottet, je venais de dire à Oscar que j’avais l’impression qu’il n’était pas heureux, il ne me dit rien de cela dans sa lettre, mais je le devinais entre les lignes, alors ta lettre est arrivée qui m’a confirmé mon impression. C’est dommage, cela valait la peine d’être fiancé pendant plus de dix ans ! En tout cas ce n’est plus par amour qu’il l’a mariée, sa femme Je le regrette pour lui, mais il n’y a rien à y faire, pas ?
Je pense aussi souvent à la Mineli Widmer, bah ! c’est sûr, elle est arrivée là (Congo belge) chez son type et a trouvé la maison et tout déjà installé de sorte qu’elle n’a rien à faire. Une fois que c’est organisé et que les domestiques savent ce qu’ils ont à faire et comment on veut qu’ils le fassent, ils travaillent comme des chronomètres, tu n’as presque plus besoin de t’en occuper, tous les jours à la même heure ils font la même chose. Ainsi la Mineli n’a rien à faire, je la comprends bien. Pourvu que son type n’ait pas eu une maîtresse noire avant son mariage. Bah, elle est encore jeune, si cela ne va pas elle reviendra, il ne faut jamais s’en faire dans la vie, es chunt doch alles wie nes muess (tout vient comme cela doit).
Cette semaine qui vient de passer, je me suis faite une combinaison en crêpe de chine artificielle blanche. Elle n’a pas trop bien réussi, mais tant pis, quand j’aurai un buste cela ira bien. Demain je vais commencer une autre petite robe bon marché, toujours pour m’exercer. Les moulures je ne vais pas les défaire avant que j’aie un buste, alors je pourrai travailler avec précision et faire de jolies choses. Je vais donc les garder encore quelques temps. A la prochaine occasion que nous aurons d’aller à Djocja ou à Solo, je vais m’en occuper. Je pense que je pourrai m’en procurer un pour environ Frs. 15.--  , tu comprends cela me vient meilleur marché que de le faire venir. Quant à mon chic, ne t’en fais pas, bien que je ne sois pas toujours à la dernière mode, je ne me laisse pas aller, je suis toujours bien habillée, avec goût. Tu comprends, ici on ne peut pas suivre la mode de si près, elle change beaucoup en hiver à Paris, et ici nous n’avons pas d’hiver, alors je continuerai à faire mes robes d’après les Jardins des Modes de l’été. Aussi longtemps que je les aurai, tu n‘as pas besoin d’avoir peur. Quand j’aurai un buste, je prendrai aussi une couturière pour un à deux jours par mois. Il faut les payer Frs. 2.--  par jour, alors moi je m’occuperai de couper d’ajuster et c’est elle qui pourra coudre à la machine, car ces couturières ici, n’ont pas la moindre idée de chic, cela sait tout juste coudre à la machine. C’est juste ce qu’il me faut, ainsi j’avancerai vite, car de faire les ourlets, et les finissages prennent du temps.
Ta lettre, (envoyée de Sutz) je l’ai donc reçue comme d’habitude, mais quand tu pourras, il vaut mieux l’envoyer depuis Bienne directement. Merci pour tes conseils pour semer, je vais les suivre.
Jo mynes Mamali, je connais ton cœur de maman, et tu sais que je te dis tout. Quant à la Ricshaw, je l’ai amenée où je l’ai voulu, nous sommes maintenant gentilles l’une avec l’autre quand l’occasion nous fait nous rencontrer, mais nous ne cherchons pas notre compagnie, elle reste bien gentiment chez elle et moi chez moi. C’est bien mieux ainsi. Au commencement, je me disais qu’il me fallait avoir quelqu’un, c’est pourquoi je la laissais venir chez moi et j’allais chez elle, mais comme ces entrevues ne m’apportaient chaque fois que des colères, il vaut mieux qu’elles aient cessé. Maintenant tout va bien, elle ne peut plus me lancer des fions, et moi je n’ai plus à jouer l’hypocrite, bien que je le sois encore toujours quand nous nous voyons, oh ! c’est sûr, je suis toujours très gentille, aussi gentille que sa conduite me le permet, mais tu penses bien que si elle tourne le dos et fait semblant de ne pas me voir, etc, je ne vais pas lui lécher le cul. J’ai aussi du caractère ! Comme je te l’ai déjà écrit, je n’ai vraiment pas besoin de compagnie, mon Buby me suffit. Nous lisons les mêmes livres et ensuite nous en parlons, il est aussi toujours prêt à m’écouter, à m’expliquer ce que je ne comprends pas, etc. Oh ! non, pour rien au monde je voudrais changer, je suis si heureuse.  Pour le reste tout va bien, la santé continue à être bonne, j’ai bonne mine aussi et Oscar se porte bien. Il ressemble tous les jours plus à son papa. Il est devenu tellement homme, on ne pourrait plus le prendre pour un Buebli maintenant. Ne te fais pas de soucis, je fais attention de ne pas manger trop richement, mais simple et sain.
Pourvu que toi tu ne te fatigues pas trop, stpl, prends ton repos après dîner. Et tes jambes, je pense qu’elles ont recommencé à te faire mal. Tu sais, de temps en temps j’ai aussi froid aux reins, froid, je ne peux pas me réchauffer, et cela seulement à une place, c’est très drôle. Moi je pense que tes maux provenaient plutôt de la sciatique que des varices. De temps en temps la jambe me fait mal, surtout si je suis restée debout longtemps, une fois ou l’autre à papoter avec madame V. Alors le lendemain je suis sûre de sentir mes jambes, tout comme toi, c’est pourquoi je crois que ton mal est aussi de la sciatique, qu’est-ce que tu en penses ?
Et maintenant ma mamali chérie, assez pour aujourd’hui et cette semaine, je vais commencer ma robe et vous en enverrai une photo. Sais-tu déjà l’adresse des Haury, (Tata et Max, St Gall), la nouvelle ? Je vais leur écrire pour souhaiter la bienvenue dans le nouveau logement. Si tu veux un bon conseil, ne les prends pas en vacances, ils sont trop difficiles, et je t’assure que même s’ils payaient beaucoup, tu n’en ferais pas de profit mais tu aurais encore des dépenses inutiles, sans compter les colères, non, sois intelligente et lâche ce projet, subito. Voyons, après toutes les expériences que nous avons déjà faites, je ne comprends pas que tu reviennes encore sur ce plan. So et maintenant terminé. Je suis contente que tu n’aies pas l’ennui, je n’en ai pas non plus, ma vie ici me remplit tellement. La Ricshaw vient de passer ici. Lui, nous a fait faire une porte pour que les deux petits chiens ne puissent pas s’échapper. Alors on les a invités pour un apéritif. C’était gentil, tout a bien été. De cette manière c’est plus facile, quand on ne se voit pas trop, mais de temps en temps cela ne gêne pas.
God bless you with all my love, ma chérie



mercredi 25 novembre 2015




Linette, Oscar, Nelly, Flock
Sutz 8.8.1933
8 juillet 1934

Keboemen

Est-il possible qu’il y ait déjà 11 mois que je sois mariée ? Je ne peux pas le croire encore, Oscar non plus ne peut pas le réaliser, il nous semble qu’il y a à peine quelques semaines que nous ayons quitté l’Europe, et tous nos chers à la maison. Les années passaient toujours vite pour moi, mais celle-ci bat tous les records, c’est incroyable. En tous cas, mes chers, si vous avez consenti à un sacrifice dans votre affection pour moi, en me laissant partir si loin, dites-vous bien que vous ne l’avez pas fait pour rien, car jusqu’ici mon sentiment de bonheur a toujours été augmentant, malgré tout ce que j’ai passé en vous quittant tous, j’ai bien senti la séparation mais ne me suis jamais sentie seule, ni pour mes pensées ni autrement. Toujours nous avons trouvé l’un dans l’autre le compagnon prêt à partager toutes nos joies, toutes nos peines, tous nos états d’esprit, toutes nos sautes d’humeur. J’ai beaucoup appris pendant cette année, mais j’ai le sentiment de ne pas avoir changé, si ce n’est d’être devenue une année plus vieille et peut être un peu plus tranquille, je suis « settled », quoi. On dit toujours que cette première année de mariage c’est souvent la plus difficile entre les deux époux, eh bien, je suis contente de pouvoir regarder en arrière et constater que nous avons su diriger notre barque entre les écueils, elle n’a pas reçu beaucoup d’atout et c’est avec confiance que nous nous embarquons pour la deuxième croisière. C’est fou ce que le temps passe, c’est presque dommage, mais en même temps cela nous rapproche du retour en Europe, n’est-ce pas?
Nous avons eu un dimanche tout à fait tranquille. Oscar a été au bureau toute la journée, et en rentrant il s’est amusé avec les petits chiens. Il est 8 heures moins le quart maintenant et Oscar est déjà au lit, tellement il est fatigué. La fin du mois est de nouveau passée, alors il doit rattraper son sommeil perdu. Ce matin à 9 heures, Nieburg est parti pour Batavia, la fabrique de Rangkasbitoeng, cela fait que Buby est seul maintenant au bureau et doit remplacer m. Visser quand celui-ci est en tournée. C’est un poste assez lourd de responsabilité et Buby doit maintenant s’astreindre à le bien remplir, pour cela il a besoin de tout son temps pour étudier et aussi se concentrer, car il est le premier qui y soit arrivé aussi vite, après 2 mois d’apprentissage alors que les autres jeunes gens ont eu le temps de se mettre au courant pendant plusieurs années souvent. Enfin j’espère que tout ira bien, et je vais tâcher de lui aider autant que possible. Mais vous pouvez bien penser que cela ne nous fait pas des amis, cet avancement rapide ! Oh ! mes chers, je vais arrêter pour ce soir, j’ai trop mangé. On a eu des rondes (pdt en robe des champs) avec du beurre et de la salade aux racines rouges et aux concombres. C’était bon, et notre caneton aussi à midi, et notre riz. Mais je dois avouer une chose, bien que je sois au pays du riz, je ne l’ai pas encore mangé aussi bon que chez nous à la maison, Mamali, pour cela tu as le monopole. (Garçons ! vous n’avez qu’à vous taire, il n’y a jamais eu trop d’oignons !). Ma baboe trouve cela drôle de cuire le riz avec quelque chose, même avec du sel. Ici c’est le riz cuit à l’eau pure et passé 2 fois à la vapeur pour le sécher, mais aussi on ne mange jamais du riz tout seul ici, c’est l’aliment de base pour leurs mille et une spécialités. Mes chers, maintenant bon soir…  et dire que vous venez seulement de digérer votre caneton, car à Sutz il doit être 1 heure, ou plutôt 13 heures et Faaather qui ronfle dans le rocking chair, sa baffle bien exposée au public ! J’aimerais aussi une fois une photo de Faaatherli, c’est pourtant toujours mon vieux Macaroni ! Voilà bonsoir, ta Ge…,!
Lundi matin, il est déjà 10 heures, je ne sais pas comme le temps passe. Avec ces deux petits chiens on perd un temps fou, ils sont si rigolo et veulent toujours jouer, aussi je ne peux pas souvent résister à aller courir avec eux au jardin. Cela serait de nouveau quelque chose pour toi, Faaatherli, : - Ne courre pas, cela a mauvaise façon ! – Hein, mais maintenant je m’en fous, je cours autant que je peux et saisis chaque occasion, qu’est-ce que tu veux quand on a des longues jambes. !

Je vous ai décrit mon dimanche, je vais vous faire ma chronique à rebours cette fois-ci. Samedi : j’ai été en ville avec madame Visser, acheter des bananes. Elle doit toujours en avoir de spécialement jolies pour la petite Hanny, alors en ayant vu vers un petit magasin, nous nous sommes arrêtées et avons appelé l’homme qui était au fond de la boutique.
sarong et topi
 Il n’avait mis que son sarong enroulé autour des hanches, le torse tout nu, alors ayant vu qu’il avait à faire à de la clientèle si chic, il a voulu être très poli, et avant de venir parler avec nous, il a vite couru mettre son topi (c’est leur sorte de turban fait en toile batik comme le sarong), pour un musulman c’est signe de politesse d’avoir la tête couverte. Moi j’ai attrapé le fou rire de voir ce gros homme déjà d’un certain âge vite se coiffer de son turban, se trouvant ainsi très bien habillé pour recevoir sa clientèle, et ne se gênant pas le moins du monde de son torse nu. Je ne peux pas bien vous décrire la scène, mais peut être que vous saisirez tout de même le comique que moi j’y ai vu.
Buby m’a réveillée en rentrant du travail. Après une tasse de thé il est retourné au bureau tandis que moi j’ai été faire un petit tour avec madame Visser et Nicki, à 7 heures nous avons repris les messieurs au bureau et en rentrant nous avons trouvé un chinois qui nous attendait. Il voulait nous vendre des …. chinoiseries. Nous l’avons laissé déballer son butin, des vases merveilleux et des assiettes comme papa Woldringh en a à Laren. Nous nous sommes laissés tenter et avons acquis une immense assiette peinte à la main, déjà vieille, que nous nous payons à l’occasion de notre anniversaire de mariage. Nous ne pouvons comme que comme pas aller nulle part, alors il faut bien que nous ayons quelque chose. Nous allons la pendre dans notre salon et nous en réjouir les yeux. Jeudi : j’ai vite été en ville le matin, acheter les timbres pour tout le mois, (j’en ai eu pour Frs. 17.50 !) payer mes impôts et mettre nos économies à la poste. C’est quelque chose que j’aime toujours bien faire. Nous les portons ainsi par petites sommes à la poste et quand nous aurons Fl. 100.--  dont nous pouvons disposer, nous les mettrons à la Mexolie où ils rapporteront du 41/2 % au lieu du 2 1/2% à la poste. Mercredi : cela a été le jour des visites. Le matin à 9 heures nous avons eu le Pater van Voorst tot Voorst, notre connaissance du bateau, qui se rendait à Batavia et voulait nous saluer entre deux trains. Cela nous a fait plaisir et beaucoup de bien. Il a déjeuné avec nous et à 11 heures il est reparti. La visite état très courte mais tout de même très agréable.
Au dîner, par hasard, j’ai parlé de M. Meyeringh, alors Oscar s’est subitement rappelé que ce dernier lui avait dit qu’il viendrait prendre une tasse de thé à 5 heures. J’ai vite fait faire des sandwichs au foie gras. J’ai maintenant dressé ma baboe pour les faire et les arranger joliment sur le plat, de sorte que je n’ai plus à m’en occuper, et peux tranquillement recevoir mes visites. Il est resté jusqu’à 7 heures. Mardi : passé le matin à blaguer chez madame V. et à m’occuper des petits chiens. Lundi : visite des Engelhart, ce que je vous ai déjà raconté dans ma précédente, je crois. A présent mes deux chiens sont assis ou plutôt couchés sous ma table à écrire, ils sont drôles, ils me suivent à chaque pas et veulent toujours être près de moi ou près de Buby quand il est à la maison. Nous les avons baptisés … Tip-Top, Tipsy c’est la petite femme, et Topsy le mâle. Vous en aurez des photos. La femelle nous embête un peu, mais on ne pouvait pas refuser de la prendre, tant pis.
Mes chers, ma salade croît bien, je l’ai fait transplanter hier soir, j’espère qu’elle donnera de belles têtes. J’ai reçu une longue lettre de M. Mottet (comptable de la fabrique familiale) cette semaine. Aussi une lettre de l’amie de madame Ziegler-Ryser, qui m’a écrit et invitée. Elle se trouve maintenant à Bandoeng où son mari a ouvert un sanatorium, Solsana, elle m’a en même temps envoyé un prospectus !!! Je vais naturellement lui répondre, mais à en juger la lettre je ne crois pas que nos relations seront très suivies. Mes chers, je vous quitte, addio, un muntschi à chacun.










1er juillet 1934

Keboemen

C’est dimanche, Oscar est au travail depuis 61/2 heures, et hier soir jusqu’à minuit, car c’est la fin du mois. Je lui ai tenu compagnie au bureau en faisant une poche à serviette, encore celle que j’avais achetée en son temps. J’arrive enfin à les finir !

(original minuscule)

Aujourd’hui nous aurons probablement la visite des Engelhart venant nous apporter nos deux petits chiens. Gare, on va en avoir à faire, ils n’ont que quelques mois.
Buby est de nouveau remis complètement, jusqu’à quand ? C’est maintenant la saison sèche, mais aussi celle des vents assez violents. Heureusement qu’ils n’influencent pas mes rhumatismes qui vont très bien, quand je fais attention de ne pas prendre froid. Notre maison ayant 5 fenêtres et deux portes est un formidable trou à courants d’air, c’est pourquoi Buby s’enrhume toujours maintenant qu’il y a tant de vent. Nous avons demandé qu’on nous pose des fenêtres, c’est à dire des vitres, sans quoi on doit avoir les jalousies fermées toute la journée, et encore, ces jalousies ne retiennent pas le vent non plus. Je vous dis c’est comme au Chalet ! Mais on l’aime bien tout de même notre maison, on pourrait peut être prendre une plus grande, celle des deux jeunes gens d’en face. Elle a un grand jardin, mais les inconvénients sont qu’elle est tout au bord du kampong (village indigène) d’un côté et qu’elle voisine avec celle des Röhwer, de sorte qu’ils entendraient tout ce qui se dit chez moi à la cuisine, salle de bain etc. Ce sont deux raisons capitales qui nous font préférer de rester ici, dans notre premier petit nid, malgré le jardin plus avantageux. Le comptable Nieburg part donc pour Rangkas, une autre fabrique près de Batavia, le 8 courant, alors Blockhuis, restant seul, va déménager dans une maison plus petite dans la même rangée que la nôtre. Je suis si contente, notre maison est séparée et bien pour elle, ainsi on n’a pas de voisinage ennuyeux. Maintenant voyons ma chronique.
Lundi, rien de spécial, j’ai écrit toute la journée, je crois, et aussi commencé à travailler pour Nicki. Mardi, travail fou toute la journée jusqu’à 11 heures du soir pour faire et broder deux coussins pour sa voiture. Je les ai fait en bakor, cette fibre tressée en beau tissu de paille, couleur naturelle beige clair. Le coussin pour le dos je l’ai brodé avec de la laine, des ronds de différentes grandeurs et couleurs, l’effet en est très joli. C’est un cadeau qui ne m’a coûté que du travail et quelques cents de kapok (fibre). Le mercredi matin donc, déjà à 7 heures, Nicki a reçu son petit ricshaw (un vrai cette fois !) peint en vert clair, avec son petit cheval brun clair. Quelle fête ! Madame Visser l’a fait faire par un ouvrier de la fabrique sous le contrôle du vieux Röhwer, mais au lieu de devenir bon marché, cela lui est revenu à un prix fabuleux. Elle en avait affreusement les bleus, mais maintenant quand on voit la petite Nicki toute blonde et rose dans sa voiturette verte, on est enchanté. Oscar en fera une fois une photo. J’ai donc fait apporter les coussins et à 10 ½ heures je suis allée moi-même féliciter les parents. Oui, c’est une coutume hollandaise d’aller féliciter les parents et toute la famille à l’occasion de l’anniversaire d’un membre. En arrivant là, la Ricshaw y était déjà, elle m’a à peine saluée et j’étais en train de me demander quelle pouvait bien être la cause de ce nouvel accès de gentillesse, quand j’ai vu mes coussins sur la voiturette qui étaient simplement ravissants. Aha ! je me suis dit, elle est jalouse, et j’ai su de suite que mon cadeau avait fait plus d’effet que le sien. Oh ! je commence à la connaître, ma Ricshaw. Je n’ai rien fait semblant et peu à peu elle s’est remise et m’a même parlé normalement. Nous sommes restées chez madame Visser jusqu’à midi, ensuite les messieurs sont aussi venus féliciter, et nous avons pris des apéritifs, de la bière, et d’immenses assiettes de bami et de sotto que madame V. avait fait préparer. A 1 ½ heures enfin, nous sommes rentrés chez nous, où la baboe attendait patiemment avec son dîner froid. Nous n’avons plus rien mangé qu’une tasse de bouillon, le reste a été avalé le soir. J’avais du rôti hâché, de la salade cuite en laitue, des pommes de terre à l’eau et un pudding aux fruits. Je ne sais pas, mamali, mais tu sembles croire que nous mangeons comme des rois, too rich food. Je t’assure que ce n’est pas vrai, nous avons tous les jours de la soupe, des légumes, des patates et un petit dessert, la plupart du temps des fruits. J’achète un os à moëlle 2 fois par semaine et cela me donne de bonnes soupes pour 4 jours. Les autres jours je fais faire des soupes aux légumes, aux flocons d’avoine, au pain, etc. Aujourd’hui dimanche, nous avons de nouveau du riz, un caneton, et des légumes javanais, la seule chose à laquelle je fais attention est de toujours avoir des menus équilibrés, c’est à dire comprenant un peu de tout le nécessaire en vitamines etc. Mais je vais suivre ton conseil quant aux œufs. En effet Buby est maintenant assez bien portant, une nourriture simple lui suffit malgré son travail mais je t’assure que c’était un peu nécessaire au commencement, car j’avais peur qu’il ne puisse pas supporter l’effort qu’il devait faire les premiers temps, à la fabrique et avec le nouveau climat. Nous avons toujours au moins une fois par semaine un jour sans viande. Je deviens paresseuse quant à la cuisine, je ne cuis plus jamais rien, je ne fais plus de vol au vent, plus rien du tout, sauf tous les samedis matins un cake qui dure généralement jusqu’au vendredi. Oh ! mais je m’éloigne de mon sujet, revenons à nos moutons. Jeudi soir, nous avons été au cinéma, Buby et moi, voir Lilian Harvey dans « My lips betray », un film charmant sinon d’une grande valeur de contenu. Nous étions avec toute la bande de Premboen, et les Röhwer, assis devant nous tous. Ce qu’on les a embêtés, fantastique, quelque fois on hurlait de rire, surtout madame Engelhart, qui peut rire comme toi, mamali ! Vendredi – j’ai écrit toute la journée, et pas fait grand chose autrement. Hier samedi, madame V. est venu m’apporter du riz qu’ils avaient reçu d’un chinois, alors un peu avant midi, on a décidé d’aller faire un tour en ville en auto, une petite demi-heure. Le soir, je me préparais justement à rejoindre Buby au bureau quand la Ricshaw arrive, pas trop sûre d’elle même en devinant ma surprise de cette visite, je pense. Enfin, avec un mauvais œil elle me demande si nous irions manger la rijsttafel demain, chez eux.  J’ai eu la chance de pouvoir refuser, vu qu’Oscar doit travailler toute la journée. Mais cette semaine je vais être gentille de nouveau avec elle pour pas qu’elle se fâche de ce refus, qui n’est pas le premier. Oh ! je vous dis, c’est des chats, les femmes. Hier soir, jour de paye pour mes zigues ici, le kebon m’a demandé une avance de tout un mois, parce qu’il devait se bâtir une nouvelle maison. C’est donc une avance de Fl. 8.-- qui lui permettra d’acheter les bambous nécessaires pour sa maison, et de vivre chichement pendant tout un mois. Ils ne mettent jamais rien de côté, ces gens, ça se contente de peu, ça vit au jour le jour sans soucis du lendemain.
A l’instant il revient du marché d’où il me rapporte 2 canetons de près de 10 semaines pour 21 cents, et deux petits entok de quelques 4 semaines pour 13 cents. J’en ai maintenant 9 pièces en tout. Mes poules ont de nouveau toutes crevé de maladie, je n’en veux plus. Un de mes petits entok, tu sais papa, ceux qui ressemblent aux canards de barbarie pour la forme mais qui ont des plumes brunes et blanches, eh bien, un des petits a eu une maladie. Il ne pouvait plus se poser sur une patte, elle était tout à fait sans vie, et les palmes se sont tout à fait rétrécies, de sorte qu’il n’a que des griffes à une patte. Pendant quelques jours, les deux pattes ne pouvaient pas le supporter, il se traînait sur le ventre, maintenant une patte va mieux, mais celle des griffes est faible encore. Oscar le masse tous les jours. Je me demande ce que cela a été, peux-tu me le dire ? Est-ce une maladie contagieuse ? Il avait toujours bon appétit, tu sais. Faut-il ne pas le manger ? Pour cela toutefois, il est encore trop petit, il n’a que 6 semaines environ. Et maintenant, mes chers, je vous quitte, je dois encore écrire à papa W. Ne m’en voulez pas que ma lettre soit aussi courte cette fois ! Portez-vous bien, and all the best to you all, Ge…..

original très petit




lundi 16 novembre 2015








29 juin 1934

Keboemen
(A son frère Louis)

Chauffeur Marchand, Salut !
Ta lettre du foyer du soldat m’a enchantée. Je suis si contente que cela te plaise et cela semble aussi bien t’aller. J’ai reçu aujourd’hui des nouvelles de maman qui me dit que tu sorts souvent avec les officiers. C’est chic sûrement. Est-ce qu’ils te donnent un pourboire au moins ? Il y en a sûrement aussi des râteaux ! Mon Chüggou, j’aimerais tant encore avoir d’autres photos de toi, à la caserne ou en exercice, telles que Charlot avait pu les acheter lors de son cours. Ta sale binette est toujours sur ma table à écrire, cela ne l’embellit pas au moins, mais que veux-tu, je n’ai pas de plus mauvaise place pour ce bout de carton.

Oh ! mon vieux, je me tords encore les côtes de cette farce que vous avez jouée avec le cirage, bon sang ce que j’ai ri, et Oscar aussi. Cette photo de toute ta section, je l’attends, tu sais. (Ce qu’elle peut être meule ma « schwoscht » (sœur), quand elle a quelque chose dans la tête !) 
Je t’entends raisonner ainsi, et ma foi, je m’en fous, pourvu que j’arrive à mes fins. Dis donc, qu’est-ce qui t’a valu de rester en caserne pendant tout le dimanche de la visite de Coen (frère cadet d’Oscar) ? C’est ce qui s’appelle une bonne punition, cela.
Ta lettre de Bienne, du 1er mars m’est aussi bien parvenue. Bah ! mon vieux, tu n’as pas besoin d’éprouver cette « honte immense » (elle ne t’a sûrement pas fait mal au ventre pendant un quart de seconde cette honte, mais enfin) parce que tu ne m’écris pas souvent. Vois-tu, je comprends bien les choses, ne t’en fais pas et aussi longtemps que tu ne m’oublies pas tout à fait, que tu saches encore que tu as une sœur quelque part là-bas et que tu lui envoies de temps en temps une pensée affectueuse, cette sœur se tiendra bien tranquillement contente.

Merci des nouvelles que tu me donnes de maman, et je suis confiante en ta foi de frère, mon petit frère. Bon sang, tu sais des fois, mais non, moi aussi je garde le dessus. Mais l’autre soir, mon vieux, Oscar était au lit avec un refroidissement de nouveau, j’ai joué une des marches militaires que papa m’avait envoyées, et j’ai dansé avec ta photo, alors,… alors tout d’un coup…., oui, mais tu ne le diras à personne, hein, tu promets ? Qu’est-ce que tu veux, on a trop fait les fous souvent, je me suis tant amusée avec vous deux, et maintenant ici c’est plus tranquille, plus de jonglage, plus de chambard. Oscar est bien devenu plus gai, mais ce n’est pas encore mes frangins. Je t’assure que c’est la seule chose qui me donne du fil à retordre, sans cela tout va bien. Surtout ne va pas te faire du souci parce que je t’ai confié cela. Mais tu sais on s’est promis de tout s’écrire, et à vous je le peux, à maman ces petites choses lui font trop vite du souci, elle fait d’une puce un éléphant. Autrement tout va bien, la santé est bonne, l’humeur aussi, le travail marche et le temps passe trop vite. Tu sais ce n’est pas que j’aie l’ennui de vous, de la maison, mais non, je me plais ici, je suis heureuse avec Oscar mais voilà, c’est le souvenir du bon vieux temps qui ne reviendra plus, le souvenir de notre jeunesse, de nos amusements de jeunesse plutôt, qui me hante des fois. Mais enfin zut, il fallait s’y attendre, et puis cela ne dure pas longtemps, heureusement Oscar est là qui réussit toujours bien à me faire reprendre le dessus Pour cela,  tu  sais, il est unique, c’est fou ce qu’il a de la patience, de la compréhension. Je crois que je l’ai déjà écrit à Charlot, ou même à toi peut être ? Vous allez dire que je commence à radoter !
Des nouvelles de nous ici, je n’en ai pas à donner, outre que ce que j’écris à la maison. C’est de nouveau la fin du mois, alors Oscar doit travailler le soir, car en trois jours le trois de chaque mois, le bilan mensuel doit être envoyé à la direction, avec cela il y a plus de 500 comptes à boucler. A partir de demain soir je l’accompagnerai au bureau, lui tenir compagnie et aussi pour ne pas rester seule à la maison, quoique je n‘aie pas peur seule, tu sais ! Ne vas au moins pas croire une absurdité pareille.
Quand tu m’écris, n’oublie au moins pas de me donner des nouvelles de maman et de papa et de Charlot. Est-ce qu’il est vraiment dans un club de gym maintenant ? Il ne m’en écrit rien dans sa lettre. Tu as raison, il ne faut pas le laisser s’empâter.
Après le service, que comptes-tu faire ? penses-tu aller à la Widemann (HWS Huber Widemann à Bâle), ou est-ce que papa te veut à ses canards ? Mon vieux, tu te rappelleras ce que tu m’as promis, hein, s’il y a la plus petite chance, ne la manque pas. Nom d’une pipe, si tu avais une chance de venir ici, mais pour le moment c’est aussi mal qu’ailleurs. Figure-toi qu’il y a des Européens qui viennent colporter du savon, du papier à lettre, des brosses à dents etc. Et des messieurs tu devrais les voir des fois, c’est à fendre le cœur, mais voilà ils sont sans travail. Mon vieux, le meilleur que je puisse te dire, ne perds jamais ton temps, apprends tout ce que tu peux, développe-toi tant que tu peux, de tous côtés.
Après demain on reçoit deux petits chiens, âgés de quelques mois seulement, on s’en réjouit.
Je viens d’apprendre d’une lettre de maman, que les Brero (locataires du chalet pour l’été) sont arrivés. Je pense que cela va bien changer la vie du Chalet (Sutz près de Bienne) maintenant, mais enfin, il faut s’arranger comme on peut par ces temps de crise.
Mon vieux, je te quitte pour cette fois. Tu ne reçois pas une lettre bien intéressante, mais tant pis, hein, j’avais seulement un peu envie de causer avec toi, et maintenant je vais te quitter pour aller faire de l’ordre dans un coin ou l’autre, et coudre un peu. Tu sais, c’est fou ce que le temps passe vite ici, ces semaines, elles filent, filent, sans me laisser le temps de finir la moindre des choses, toujours c’est samedi, toujours c’est le moment du courrier. Mon Chüggou, porte-toi bien, tiens-toi bien, amuse-toi bien mais ne perds pas ton temps. Je me tiens toujours le pouce pour vous, et t’embrasse bien fort
A la main
Ta sœur qui t’aime
P.S. je joins des photos pour maman




samedi 14 novembre 2015





25 juin 1934

Keboemen

Cette lettre-ci sera extra courte parce que mercredi c’est la fête à la petite Nicki et je dois encore faire son cadeau. J’ai attendu jusqu’à la dernière minute, ne sachant pas que lui donner. C’est une enfant qui a tout, absolument tout. Pour son anniversaire, sa maman lui fait cadeau d’un petit poney avec une petite voiture qu’elle a fait faire. Moi, je me suis offerte à fournir les coussins que je pensais faire en belle cretonne fleurie, mais ce n’était pas du goût de la maman. Je crois qu’elle aimerait bien les avoir en cuir, mais ohä, la Näggeli ne va pas si loin. Maintenant je les fais en natte, les mêmes que mon petit banc au salon, et je les brode avec de la laine en couleur gaies, et flûte, je m’en fous si c’est de leur goût ou pas. Je suis persuadée maintenant que nous ne nous entendrons jamais en matière de goût et de couleurs, ces deux dames et moi. Je suis si différente en ces choses-là, trop moderne pour elles. Enfin, je m’accorde avec Buby en cela, et c’est le principal. Autrement Mme Visser est toujours la même avec moi, très gentille et toujours prête à m’aider. Je crois qu’ils nous aiment beaucoup, mais voilà on est bien trop différents pour que cela ne devienne jamais très solide. Enfin, cela va bien ainsi.
Voyons vite ma chronique. Mardi – rien de spécial, nous avons joué au tennis, j’ai été chez madame Visser le matin, j’ai acheté des pommes, des citrons pour faire du sirop. Jeudi matin j’ai été en ville faire les magasins acheter des pattes pour faire des robes de poupée pour Nicki. J’ai aussi acheté de l’étoffe pour une petite robe. Cela paraît être un tootzisha, mais pas d’aussi bonne qualité, cela coûte Fl. 0.40 l’aune (ancienne mesure), c’est donc environ 70 cm. L’après midi j’ai dormi et le soir à 6 ½ heures, nous avons pris le train pour Premboen, avec madame Hartong et… le Ricshaw. M. Hartong avait été en auto déjà dans l’après midi, car ces soirées de tennis correspondent à des rapports bi-mensuels qu’il doit faire à M. Engelhart, concernant la fabrique de sucre (canne à sucre) de Keboemen. La soirée a été très gentille. Je me suis bien amusée, et Buby a beaucoup joué au tennis, moi pas trop, j’ai plutôt fait en sorte de me trouver souvent avec madame Engelhart pour mieux lier connaissance et effacer tout le mal qu’elle doit avoir entendu de moi. Je crois que j’ai réussi, je l’ai regardée si gentiment, tu sais bien comment ! Enfin cette fois-ci c’est la Ricshaw qui en a eu pour son rhume. J’ai l’impression que nous avons de nouveau pris pied et cela me fait plaisir, car bien que les gens ne me disent pas grand’chose et à Buby non plus, il faut pourtant garder un certain contact, absolument, même si ce n‘est que pour faire une petite répétition de savoir-vivre de temps en temps, et pour ne pas perdre l’habitude de se mouvoir en société, dans le monde, quoi !
Vendredi j’ai cousu toute la journée, j’ai été au jardin, j’ai fait planter des zinnias que j’avais semés. La journée a passé je ne sais pas comment, à bricoler par ci et par là. Samedi - aussi, j’ai écrit un peu, j’ai cousu et à midi Buby est rentré  et s’est mis au lit, avec un peu de température. Naturellement que mon après-midi a été fichue, vous comprenez, j’ai dû « chouchouter ». Dimanche le matin j’ai vite été en ville chez le coiffeur. Vous avais-je écrit qu’il vient un coiffeur ici chaque dernier dimanche du mois. Cette fois j’ai été seule, les autres dames n’étant pas encore arrivées, alors je lui ai bien dit comment je voulais avoir la coupe. Il s’est donné de la peine et m’a bien coupé. Je n’ai pas manqué de lui faire sentir que s’il me servait bien, il pourrait compter sur moi comme cliente régulière.
Aujourd’hui, lundi, Buby a été au bureau, mais il est revenu avec des frissons, pourtant il n’avait plus de fièvre. Le matin j’avais été promener avec Mme V.  En rentrant je n’ai pas mis Buby au lit vu qu’il n’avait pas de fièvre, mais il est resté étendu sur une chaise-longue, pendant que moi j’écrivais et travaillais à ces coussins pour Nicki. A 11 heures j‘ai vite été chez Mme V. et elle a réussi à me persuader qu’il fallait faire venir le médecin. Elle a donc téléphoné, et une demi heure après un assistant arrive pour prendre du sang. Le dr. voulait d’abord l’analyser avant de venir. A trois heures un autre assistant vient encore une fois pour une deuxième prise, et enfin à 5 ½ heures le docteur arrive. Il a été un peu étonné de voir Oscar debout mais on lui a expliqué l’affaire, que les Visser m’avaient fait peur etc. Il a dit qu’il n’avait rien trouvé dans la première preuve, c’est pourquoi il avait fait prendre une seconde dans laquelle il n’a rien trouvé non plus. Il a ausculté Oscar, rien trouvé sur les poumons et a diagnostiqué un fort refroidissement. Il a dit que maintenant était la saison dangereuse, à cause des vents qu’on avait, alors on transpire et il arrive un de ces vents frais, et zut, le rhume est là. Il faut être très prudent, c’est le seul remède. Demain, le kebon m’apporte du miel qu’il aura été cueillir ce soir dans les ruches d’un de ses voisins, et j’en ferai prendre à Buby dans du lait chaud. Je suis contente d’avoir trouvé du miel, faudra voir demain comment il est. Toko Batie vend bien du miel ici, mais je crois qu’il s’y trouve pus d’eau sucrée que de miel, c’est pour cela que je n’ai jamais pu me résoudre d’en acheter. Enfin je suis contente que Buby n’ait rien de plus. Quand j’aurai fini d’écrire ici je vais vite retourner à ma broderie pour Nicki.
Figurez-vous que nous avons reçu une lettre de Ir et Bernard, ils sont à Koeta Radja, près de Sabang (Sumatra), donc tout à la pointe la plus proche de l’Europe. C’est une longue lettre presque désespérée qu’ils nous ont écrite. Cela ne leur plaît pas du tout, et pourtant c’est une ville de garnison, au moins 3 fois plus grande que Keboemen, avec beaucoup de soldats et d’officiers. Ils sont très déçus des Indes, ils ne trouvent pas la nature jolie, ils ne peuvent rien acheter et ils demeurent à l’hôtel pour le moment. Zut, ces deux, ils ne prennent pas l’aventure du bon côté, mais aussi ils sont stupides. Je leur ai écrit une longue lettre pour leur remonter le moral, Oscar a aussi encore écrit, et maintenant on verra. Ces deux, après la belle vie qu’ils ont eue en Hollande, tous les plaisirs qu’ils se sont payés, maintenant c’est dur, de se faire à la vie sérieuse. Moi cela m’embête un peu qu’ils soient aussi loin, c’est à une semaine de voyage d’ici, donc on ne pourra pas se voir souvent, mais d’un autre côté c’est peut être tout aussi bien, s’ils continuent à se montrer aussi bornés que cela.

J’allais presque oublier le principal. J’ai reçu samedi soir les deux échantillons sans valeur avec les moulures. Les robes me plaisent bien et je me réjouis de les commencer. Merci, merci, mille fois Je vais directement commencer avec cette étoffe que je viens d’acheter et qui n’est pas trop chère pour un essai, quand j’aurai bien réussi, je referai ces mêmes toilettes dans du beau tissu, pour de vraies petites toilettes. Je me réjouis.
Sans cela, je ne vois rien de nouveau pour cette fois, peut être demain matin encore vite. Maintenant bon soir mes chéris.
Merci de votre lettre du 12 juin, No 39. J’y répondrai plus spécialement dans ma prochaine, je n’ai pas le temps maintenant.
Dimanche soir j’ai fait aller mes marches militaires et j’ai dansé avec la photo de mon piou-piou !
Toujours votre….


dimanche 8 novembre 2015






18 juin 1934

Keboemen

Maintenant c’est enfin votre tour. Depuis hier j’ai écrit 3 lettres dont une à St Gall, 1 à oncle Hepner et une à Kitty. Nom d’une pipe, je suis contente d’avoir fait la correspondance au bureau avant mon mariage, ainsi heureusement j’en ai l’habitude.
Merci infiniment pour vos lettres collectives du 5 juin. Je suis sûre qu’il a fait beau là, au bord du lac par ce temps brumeux, je puis bien m’imaginer le paysage dans tous ses tons de gris. Je l’ai toujours aimé.
Mamali, j’aimerais beaucoup que tu m’écrives exactement combien de droits de douane tu as dû payer pour ces poupées, afin que je le sache pour une autre fois, si je peux encore vous envoyer des choses pareilles ou non. Si vous devez payer plus que moi je ne les achète, alors cela ne vaut pas la peine, tu comprends. N’oublie pas de me l’écrire, stpl.

Et maintenant voyons la chronique de la semaine. Vite mon agenda. Dimanche passé donc, le pic-nic sous les arbres. Vous allez recevoir des photos de cela (voir lettre du 11.6.34). Lundi vous le connaissez aussi. Mardi nous avons fait une promenade avec Buby et le soir nous avons été nous coucher tôt.
Ma lettre a été interrompue par la haute visite de Madame Ricshaw, qui venait me rapporter mes aiguilles à tricoter. Elle est restée jusqu’à midi, et n’est partie qu’après que Buby soit rentré.  J’ai été très gentille, j’ai parlé du beau temps et d’un tas de sujets également intéressants. Elle aurait bien voulu que je lui donne une occasion de parler du bal où ils ont été samedi, et de ses visites répétées ces derniers temps aux Engelhart, mais la Näggeli n’a rien senti. Elle m’a parlé des petits chiens, que je pouvais les avoir maintenant, qu’elle les avait vus, qu’ils étaient jolis. Alors elle me demande : « Comment feras-tu pour les emmener chez toi ? », « Ne t’en fais pas, quand le moment sera là, nous trouverons bien une solution ». « Peut être que si tu demandes à Madame Visser de les prendre la prochaine fois qu’elle ira à Premboen ! ». Tableau ! Deux minutes avant elle me chantait qu’elle y avait été 1 jour avant et qu’elle y allait souvent ! Elle s’attendait naturellement à ce que je lui demande le service de les apporter puisqu’elle y va si souvent en auto mais encore une fois, la Näggeli n’a pas senti le formage.  Non mais des fois, est-ce qu’elle pense qu’elle peut me réduire à sa merci ? Il en faut des plus fortes pour attraper la Näggeli ! La seule chose qui m’embête vraiment dans tout cela, c’est sa réussite à nous couper toutes les relations avec les Engelhart, parce que Buby comme moi, nous y attachions du prix. Pour moi, passe encore, mais pour Buby cela m’embête fortement, car il n’a pas souvent l’occasion de causer avec un homme intéressant. Enfin, qui vivra verra. Mais Buby a besoin de relations, je m’en suis aperçue le soir que nous avons été au cinéma. C’était jeudi.
J’avais vu la Ric dans la matinée sans qu’elle m’en souffle un mot, moi je ne savais pas encore que nous y irions. A 4 heures seulement, en recevant le programme nous nous sommes décidés et avons filé comme deux gosses en vacances à pied vers le cinéma. Nous étions justement à la caisse, voilà l’auto des R. qui arrive avec les Hartong. Ils ont fait de drôles de têtes quand ils nous ont vus là, surtout les femmes, j’avais mis mon costume gris, ma petite blouse écossaise bleue, et Buby son habit gris aussi. Puis les deux femmes sont vite entrées prendre des places, pendant que moi je me retournais vers Buby. Celui-ci avait entre temps salué M. Hartong avec un plaisir évident et sans autre est allé s’asseoir à côté de lui. Naturellement il m’a bien fallu aller vers les femmes, et la Ric m’a gentiment indiqué ma place. De ce fait j’ai été tout à fait séparée d’Oscar ce dont il ne s’est pas aperçu d’abord tant il était en conversation avec M. Hartong. J’ai vu à cela qu’il lui fallait absolument du social intercourse et je vais tout faire pour lui en procurer. Le film, Trauer um Liebe, a été de 3ème qualité, mais flûte, à Keboemen il ne faut pas trop faire les difficiles, et j’ai bien ri quand même. C’était parlé et chanté en allemand, la Ric n’y comprenait que du feu et de la paille de fer. Aussi elle ne voulait pas en avoir le nom qu’elle ne comprenait rien. A la sortie le vieux Röhwer nous dit : eh, bien, puisqu’on est si nombreux les dames vont dans l’auto et les messieurs marcheront à la maison, mais il a reçu force signe de sa meilleure moitié et j’ai entendu qu’elle lui chuchotait : ne fais pas la bête viens avec nous dans l’auto, dépêche-toi. Il n’en fallait pas plus pour que la Näggeli réponde : merci infiniment, mais nous préférons marcher, nous sommes encore jeunes et apprécions le clair de lune ! Oscar de son côté avait remarqué la manœuvre et a aussi refusé. Si je vous raconte tout cela il ne faut pas en faire un drame, rappelez-vous que sur le papier les choses ont toujours l’air plus importantes qu’elles ne le sont réellement. C’est aussi plutôt pour maman que j’écris toutes ces histoires en détail, cela donne à beinle (jaser), pour Tata aussi naturellement. Vous les hommes, occupez-vous d’autres choses !
Samedi, pardon, vendredi d’abord j’ai passé toute la matinée chez Mme. Visser, on a cousu au jardin, ou plutôt on a blagué, ensuite M Visser est venu et à midi on a fait appeler Oscar. Samedi soir après le tennis ils sont vite venus chez nous, j’avais fait faire des glaces à la vanille, et le matin j’ai fait ta tourte au chocolat. La tourte a bien réussi, mais je ne sais pas, j’ai employé du cacao pour la faire, et la quantité indiquée était un peu trop grande pour de la poudre de cacao non sucrée, de sorte que ma tourte était un peu amère. Sans cela elle est très bonne.
Hier dimanche, j’ai écrit toute la journée, Buby a lu un peu, et l’après-midi nous avons dormi puis joué au tennis, nous avons perdu les trois set par 6-0 et une fois par 6-2. Ce soir toutefois nous avons gagné un set et perdu l‘autre.
Gunung Merapi

Ce matin il y a eu une fine pluie de cendre, il paraît que le Merapi (plus haut volcan de Java) est de nouveau en action, ce n’est pas étonnant, car depuis quelques jours nous avons un temps couvert, toujours le ciel gris. Oscar a remarqué cette pluie de cendre distinctement ce matin à 9 heures à la fabrique.