mardi 29 novembre 2016




Tjilatjap

6 juin 1938

Mes bien chers,
Nous sommes à lundi de Pentecôte. Voilà 15 jours que je suis rentrée de Bandoeng et je n’ai pas encore eu le temps de vous écrire quoi que ce soit, car d’abord j’ai eu la visite de Elout encore pendant 8 jours, puis un tas d’autres gens et enfin les van der Lee qui sont arrivés jeudi et restent jusqu’à demain matin. Vous comprenez qu’il y a toujours du va et vient, avec cela j’ai des embêtements de domestiques qui manquent parce qu’il y a trop de visites etc. Enfin, laissons tout cela.
Depuis que je suis à la maison, je me sens assez bien, je continue à prendre les remèdes du docteur de Bandoeng et j’ai bon espoir de faire des progrès et de me porter tout à fait bien dans quelques temps.
Avant de partir de Bandoeng j’ai demandé au docteur de là-bas si je pouvais accompagner mon mari à Soerabaya et il a dit que oui, cela fait que nous partons vendredi soir par le train de nuit pour Soerabaya. Oscar a été avisé qu’il devait prendre part à des exercices de tir à Probolingo, environ à 100 km de Soerabaya. Pendant ce temps j’airai je pense chez tante Engel, ou alors chez la mère des Lovius, nos amis d’ici. C’est une vieille dame bien sympathique qui a une fille infirme de mon âge, et qui habite Malang. Il ne faudra donc pas trop compter sur des lettres pendant les prochains quinze jours, car je voyagerai de ci de là.

Louis tout à droite, Nelly devant lui


Mardi 7 juin. J’aurais voulu faire partir cette lettre hier, mais je n’y suis pas arrivée. Nous avons passé la journée d’hier à l’île Noesa Kambangan (institution pénitentiaire, encore aujourd’hui), chez Lovius, (il travaille à cette prison) avec les van der Lee et une autre famille. Nous avons été au bord de la mer, toute la journée, c’était merveilleux, nous avons baigné, pris des bains de soleil, cherché des huîtres, escaladé des rochers et embêté des crabes. On s’est amusé comme des gosses. 
plage de Noesa Kambangan
à Noesa Kambangan


Le soir en rentrant Lovius et le jeune docteur de l’île, un jeune homme de 28 ans seulement, sont venus chez nous jouer au Monopoly, un jeu dont tout le monde raffole ici. Malheureusement le jeune Cochius qui loge ici depuis samedi, a eu la fièvre, il est resté à la maison ici hier, et le soir en rentrant je lui ai trouvé 39.5 de fièvre. J’ai donc eu beaucoup à faire, à le soigner, à donner à souper à tout ce monde et cette nuit je me suis aussi encore levée pour donner à boire à Cochius etc. Vous penserez peut être que je suis bête de me donner tant de soucis pour des étrangers, mais que voulez-vous.
Lundi 13 juin 1938
Cette lettre est de nouveau restée en plan par je ne sais quoi. Cochius est retombé dans de hautes fièvres, 40.2, malaria terziana, comme moi j’ai eu en son temps. Je l’ai soigné, puis j’ai de nouveau eu des visites, en moyenne 2 hommes par soirée. Depuis que je suis de retour à Tjilatjap, nous n’avons eu qu’une soirée pour nous seuls Oscar et moi, sans cela il y a toujours eu et venu beaucoup de monde. Cela commençait vraiment à m’agacer. Aussi j’ai décidé de ne pas aller à Soerabaya. Nous voulions donc partir vendredi passé Oscar et moi et avoir un beau week-end à Soerabaya avant qu’il entre au service, mais avec Cochius encore malade, je ne pouvais pas bien le laisser ici au soin des domestiques et puis, j’ai eu tant de gstürm (stress) ces derniers 15 jours, que j’ai décidé de prendre de bonnes vacances pendant l’absence de Buby. Je veux une fois me payer du bon temps, ne penser qu’à moi, rien qu’à moi et faire ce que je veux. Buby n’est donc seulement parti hier, dimanche. J’ai été l’accompagner jusqu’à Kroja en auto, là il a pris le grand express pour Soerabaya. Nous avons immédiatement rencontré deux officiers de sa troupe. Il paraît qu’ils sont presque le même groupe que l’année passée et ils vont rester au camp pendant tous les 15 jours. Cela fait que je n‘aurais pas eu beaucoup de sa compagnie, ni de Soerabaya, sauf ce premier week-end, ainsi je suis contente de ne pas l’avoir accompagné. D’aller en visite, même chez tante Engel, ne me dit rien pour le moment. Cette nuit j’ai dormi chez Oliemans, parce que Cochius reste encore ici pendant 2 jours au moins. Ce soir, s’il n’a plus de fièvre, c’est lui qui ira dormir chez Kleber, ainsi tout est pour le mieux à cause des mauvaises langues.
Et maintenant je suis au bout de la page, heureusement, car elle ne vaut pas grand chose, cette lettre, et je vais en commencer une autre.






Bandoeng,

12 mai 1938

Mes bien chers,
Vous serez étonnés de voir que je suis encore toujours à Bandoeng. Vous devez savoir par mes lettres à maman que je suis restée ici depuis Pâques. Nous y étions venus pour y passer les fêtes, ensuite il a été décidé que je resterais quelques jours pour profiter du bon climat, et puis j’ai eu subitement une diarrhée très forte qui, même si je l’avais voulu,  m’aurait  empêchée de rentrer avec Oscar. Il a donc été décidé que puisque j’étais ici, j’en profiterais pour aller voir un bon médecin, un spécialiste, pour savoir une fois pour toute ce qui me fichait toujours les intestins et l’estomac en l’air à tout bout de champs, et à quel degré j’avais cette malaria. J’ai été auscultée de fond en comble cette fois-ci, il m’a même vidé l’estomac avec un tuyau en caoutchouc que j’ai dû avaler. Enfin, je n’ai rien à l’estomac, sauf un peu pas assez de sucs gastriques. Il a bien ausculté le foie mais ne trouvait rien d’alarmant jusqu’au jour où j’ai de nouveau eu de la fièvre et que je ne me sentais pas bien, pas malade vraiment, mais pas bien non plus. J’ai filé vers le docteur, nouvelle auscultation et cette fois c’est le foie qui me faisait bien mal. En même temps, il trouvait dans l’urine quelque  sorte de poison, par la bile. Il m’a fait des piqûres, cela allait mieux pendant quelques jours mais voilà que la fièvre m’a reprise, pas beaucoup, 37.1 – 37.3. Je lui ai dit que cela pouvait provenir de ma maladie de dans le temps (encéphalite, qu’elle a survécu), mais il ne veut pas trop y croire. Enfin, le clou de l’histoire, c’est qu’il veut une radiographie de mon foie, pour cela je dois entrer ce soir à l’hôpital pour 2 jours, peut être plus. On va me donner des purges, puis un tas de saletés à bouffer, et des lavements. Enfin, mes chers, je ne vois guère la vie en rose aujourd’hui, j’ai la frousse, j’ai le cœur aux culottes et ça me fait du bien de vous l’écrire. D’ailleurs, je vous ai promis de toujours tout vous écrire et je le fais, seulement j’aimerais bien que vous n’en disiez encore rien à maman pour ne pas la gêner dans sa cure à Nauheim.
Oscar est revenu ici après une de ses tournées pour un week-end. Il est bien content de me savoir en bonnes mains chez ce spécialiste qui est connu dans toutes les Indes et en Hollande. Demain soir, j’espère savoir ce que j’ai, si c’est des calculs biliaires ou quoi. Ça coûte un argent fou, chacune de mes visites chez le médecin coûte Fl. 5.- et j’ai été plus de vingt fois déjà. Et maintenant il y aura toute cette affaire d’hôpital qui coûtera bien Fl. 150.- aussi. Tant pis, je saurai au moins ce que j’ai. Ça n’allait plus les derniers mois à Tjilatjap, j’étais très énervée et toujours terriblement fatiguée. On mettait tout sur le compte du climat, mais le docteur dit que ça n’a rien à voir, que j’avais déjà dû avoir ça en Suisse, mais ça met des années pour bien se prononcer.
Enfin, mes chers, je ne suis pas en danger, loin de là, seulement j’ai quelques jours ennuyeux à passer, et loin même de Buby, ça fout un peu le cafard. 
Jeanine Boese

Jules Boese
Je loge ici chez les Boese (voir who is who), des connaissances de Batavia, dont elle est française. On s’entend bien et ils sont plus que charmants pour moi. Je n’aurais pas pu mieux tomber.


Mes chers hommes, je vous embrasse chacun de tout mon cœur et vous souhaite mille bonnes choses. Je répondrai à vos lettres plus tard. Ge….




samedi 26 novembre 2016




Bandoeng

12 avril 1938

à la main
Ma Rötteli
Et mynes Banely
Vous allez être étonnées que je vous écrive depuis Bandoeng, hein ? voilà la raison
Nous sommes venus ici pour les jours de Pâques, dans l’intention de passer 4 jours de bonnes vacances, mais voilà que le samedi soir j’ai eu une terrible diarrhée parce que j’avais trop mangé de fraises et de crème fouettée. Cette fois, Buby a voulu absolument que j’aille voir un spécialiste et pour cela il est reparti seul, me laissant à Padalarang (en hauteur dans les environs de Bandoeng) chez Wimo et Hans van der Lee. J’ai donc été chez le spécialiste le plus fameux des Indes pour les maladies tropicales, et il m’a soumise à un examen très très méticuleux. Il m’a même vidé l’estomac avec un tuyau que j’ai dû avaler. C’était pas gai, mais la seule manière d’une fois savoir pourquoi j’avais mal de temps à autre. Le résultat c’est que j’ai pas tout à fait assez de bile. Ça, ce n’est pas bien grave. Mais j’ai bien une inflammation du colon, de là cette diarrhée. Je suis de nouveau au régime pas trop sévère, mais tout doit être hâché, la viande etc. Mardi prochain, il faut que je retourne chez lui. Il m’a aussi fait des analyses de sang, et il me donnera le résultat, je pense. Il a dit que jusqu’à présent, la pire maladie qu’il pouvait découvrir en moi, c’était mes nerfs. Il veut que je reste à Bandoeng aussi longtemps que possible. Donc j’y resterai encore quelques temps, laissant l’Oscarli seul à Tjilatjap. Avant de partir d’ici, il a acheté un tas de musique, et maintenant il peut jouer tant qu’il veut, il n’a pas de Girly qui le dérange. Il m’a écrit aujourd’hui et m’a envoyé une lettre de Padre, de Charlot et de Max ( !).
Il paraît que ton régime sévère te rend aussi triste. Allons, allons, ça passera, mynes Rötteli. Soigne-toi, mieux tu le fais, mieux tu seras bien et je reprends avec confiance le projet du voyage aux Indes. Bandoeng a un climat merveilleux et il y a tant de vieux couples qui y viennent pour visiter leurs enfants. Je viens de faire la connaissance d’une Allemande, une grand’mère de 78 ans qui est venue toute seule pour visiter son fils. Dans 8 jours elle va repartir en Allemagne. Elle aura été ici 1 année. C’est pour le coup que maintenant je vois la Rötteli et le Bänggu ici. Les sociétés de bateaux ont même fait des billets de 100 jours où l’on ne paye que simple course, ainsi beaucoup d’enfants reviennent passer leurs vacances auprès des parents.
Oscar vient de m’envoyer le chapeau, ton beau petit chapeau. Il m’est un peu trop petit, le tour de tête, mais il me va très bien. Je me réjouis de l’arranger et le porterai avec plaisir. Cara mia, tu me gâtes tellement.
Je viens de recevoir une lettre de mon Buby, si gentille. Il me dit de rester ici encore quelques temps, car il fait de nouveau très chaud à Tjilatjap. Il va faire une tournée  à la fin de la semaine et tâchera de faire un saut jusqu’à Bandoeng, car il veut bien voir sa girlie. Demain je vais de nouveau chez le docteur et je t’écrirai ce qu’il aura dit, dans une prochaine lettre.
Je suis si contente d’être ici où tout le monde est gentil pour moi. Je vois la Mily (ex épouse du Consul de Suisse) très souvent, elle ne sait pas où et comment me faire plaisir. Tu vois, je suis bien entourée, et je suis si contente d’être entre les mains de ce bon docteur.
Voilà.

Bad Nauheim, Allemagne (région de Francfort)






Tjilatjap

10 avril 1938

envoyée à Bad Nauheim, spa en Allemagne où Rose et sa sœur font une cure

Zut, j’ai pris la machine parce que j’ai encore tant à schnädere  (papoter) qu’il me faudrait trop de feuilles si je continuais à la main. Je n’aime pas écrire à la machine au jardin, parce qu’il y a toujours une petite brise de la mer qui me soulève le papier et ensuite il se déchire. Reprenons ma lettre….
Buby ne sait vraiment pas ce que c’est qu’une vraie vie de famille avec une mamms au centre qui montre toujours le bon exemple et qui par son influence forme nos cœurs et nos caractères. Pourtant il a déjà bien changé, il s’y fait, je le remarque à bien des petites choses.
J’ai aussi reçu une lettre de Auntie (2ème épouse de papa W.) où elle m’écrit la même chose de Loulou. Il m’a enfin écrit depuis Kühtai, pas une longue lettre mais c’est toujours mieux que rien. Tu sais j’ai eu tant de plaisir à la lettre de Charlot qui contenait quelques mots des trois hommes, c’était si joli de voir comme ils tiennent à leur Ge… et Schwoscht. 
Merci mille fois pour le chapeau. Je ne l’ai pas encore. Buby a fait les hauts cris quand il a vu l’image et il soutient que c’est un poisson d’avril ! Il a dit qu’il verrait encore s’il me le laisserait porter !!! Je ne pourrai pas le mettre ici à Tjilatjap, mais à Soerabaya, quand il en verra d’autres, il s’y habituera. Nous allons tâcher de partir quinze jours avant le service (militaire) pour encore aller nous reposer dans la montagne avant. Il faut absolument que je passe quelques temps à la hauteur, et si Buby doit de nouveau aller camper à Madoera (île devant Soerabaya) comme l’année passée, alors je resterai à la montagne. Seulement si Buby fait son service  à Soerabaya même, alors je veux être avec lui aussi pour profiter de la grande ville un peu. J’ai déjà essayé une coiffure pour porter avec le nouveau chapeau. C’est qu’avec ces « galurins » il faut aussi suivre la mode avec les cheveux, sans cela ils ne vous vont pas. Je me réjouis de revoir un bon coiffeur à Soerabaya.
Je crois que je ne t’ai pas encore raconté que quand j’étais malade, une fois que les fièvres m’ont quittée je me suis sentie très faible un soir, parce que j’e n’avais pas mangé depuis plusieurs jours alors Buby a téléphoné au docteur pour demander si j’osais avoir un œuf dans du cognac, mais le docteur trouvait du cognac trop, il a conseillé du champagne. Alors Buby a vite téléphoné pour commander une bouteille et nous l’avons bue entre les deux, en deux fois. C’était exquis. J’ai décidé que quand ma note chez l’épicier ne serait pas trop haute à la fin du mois, je paierais une bouteille de champagne chaque fois, et que nous la boirons entre les deux, car naturellement personne n’ose rien en savoir. Mais zut, c’est un plaisir que je veux bien me payer, entre Buby et moi. Est-ce que tu n’as pas l’impression que tout se répète dans la vie, Mamms ? Je commence à te ressembler dans bien des choses. Comme ce soir par exemple, j’ai laissé Buby aller au cinéma avec ces hommes et je suis bien contente ici à la maison, tranquille et je peux me laisser aller. Je me repose bien en faisant ce que je veux. Vers les 10 heures ces hommes rentreront et j’irai leur réchauffer du risotto qu’ils mangeront avec un reste de salade que je leur ai laissé. Moi j’ai décidé de ne plus sortir ici à Tjilatjap avant notre départ pour Soerabaya. Bah, toutes ces femmes ne me disent rien du tout, cela me fatigue seulement et maintenant j’ai décidé que je voulais me soigner : Näggeli avant tout, voilà mon motto.
Peut être que nous irons passer Pâques à Bandoeng, ce n’est pas encore sûr. Si tu ne reçois pas de lettre de moi la semaine prochaine, tu sauras pourquoi. Mynes Rötteli, je vais te quitter pour ce soir. Dans un instant les hommes vont arriver. J’espère que cette lettre te trouvera ainsi que Banely, en très bonne santé and in the best of spirits. Je vous embrasse toutes les deux de tout mon cœur…..





lundi 21 novembre 2016




Tjilatjap

11 mars 1938

Mynes Rötteli mia,
Mon plaisir ne serait pas complet, si je ne pouvais pas encore vite t’écrire un petit mot bien intime. Je sais que tu jouiras comme de toutes ces fêtes avec les officiers. Tu aurais dû voir le Bueb, il m’a laissé libre, mais était toujours près de moi, j’en riais bien. Tu aurais dû voir comme il s’est donné de la peine de parlé-fou frangsais ? je regrette d’avoir eu tant de succès auprès de ces officiers, l’un d’eux était tout kaput qu’il doive partir, justement parce que je ne flirtais pas. Je les ai tous trouvés bien gentils, mais tant à prendre, je ne voudrais pas changer. Il était vraiment très compréhensif, m’a laissé faire, n’a jamais rien dit, mais mon plaisir était qu’il ne m’a jamais perdue de vue.
Le docteur me donne maintenant, comme fortifiant, les mêmes pilules que Rummel en son temps. Cela me fait du bien, aussi des piqûres pour le foie, c’est très à la mode, c’est un extrait de foie. Quant à l’autre chose, cela va toujours mieux, je suis contente, cela doit bien fonctionner si on veut un mariage heureux.
Tu sais, les Engelenberg, je les ai bien reçus, simplement et de bon cœur, mais ils ne l’ont pas compris, se sont tout de suite étalés et ont pensé que tout était permis. Le Bueb s’est beaucoup énervé et lui a finalement fait une remarque. Leur maison est terminée et ils pourraient y habiter tout de suite, sans attendre d’être mariés, mais le Bueb ne voulait pas cela. On leur avait offert d’habiter chez nous avec l’enfant jusqu’au mariage, mais c’était trop convenable pour madame, donc elle vient dormir ici le soir, mais toute la journée elle est dans l’autre maison. Enfin, c’est beaucoup trop long pour que je puisse tout te raconter, suffit que j’ai de nouveau fait mes expériences. Mon instinct du début vis à vis de Engelenberg ne m’a pas trompé, et sa femme n’est pas grand chose. Elle a bien de bonnes manières si tu veux mais elle a des traits négatifs dans son caractère. C’est encore Buby qui a trouvé cela en premier.
Je pense que nous resterons encore quelques temps à Tjilatjap, vu que c’est Erkelens qui va travailler à Batavia à son retour d’Europe. J’en suis bien un peu jalouse, mais d’un autre côté, c’est bon pour Buby de rester ici encore quelques temps, aussi ici on gagne mieux et la vie est plus saine dans ma grande maison et mon grand jardin. Seulement maintenant je ne veux plus avoir de visites pour quelques temps, j’en ai assez, il me tarde que les Engelenberg puissent se marier. Je leur ai acheté une petite pièce d’argenterie pour cadeau de noce et eux m’ont donné une très belle coupe en argent pour me remercier de mon hospitalité. Cela m’a plutôt embêtée que fait plaisir, mais tant pis.
Concernant ma robe noire, elle est bien jolie, mais je trouve tout de même que Hedy m’a trop demandé. Je comptais au plus Frs. 100.- aussi je ne vais pas me gêner pour la payer en deux fois. Tu n’en feras rien les semblants, tu diras seulement que tu n’es pas au courant de mes affaires d’argent si jamais elle t’en parlait. Le premier chèque partira demain. Cette jeune Neuchâteloise que j’avais rencontré à Batavia, a aussi une tailleuse haute couture à Berne qui travaille pour toutes les femmes des diplomates et vraiment j’ai vu les toilettes qu’elle lui a faites. Elles valent Hedy, et elle n’est pas aussi chère. La prochaine fois, je vais faire faire quelque chose chez cette couturière-là, elle va aussi toujours à Paris. Je vais lui envoyer des mesures et une photo. Cette Neuchâteloise a payé une toilette noire du même genre que la mienne, Frs. 85.-.
Je regrette que ta soirée choucroute ait si mal réussi, oh mais cela ne m’étonne pas avec cette société moindre. Je peux tellement bien me représenter comme tout a été, ce Burri couché sur le divan et s’il ne s’entend pas avec sa femme il n’a pas besoin de le montrer quand il est en visite chez des autres gens, il y a des choses et surtout du linge sale, qu’on lave en famille. Que la Hedy soit moindre, cela n’est pas étonnant, elle l’a toujours été, et on ne peut pas faire un cygne d’un canard malgré toutes les belles robes du monde. Si j’étais toi, je me tiendrais un peu à distance, elle ne t’en tient pas compte dans ses prix pour tes robes, n’aie pas peur ! combien dois-tu payer la façon des robes de Max ? Stpl. dis-le moi.
Oui ce Max est un bel asticot ! La vie le lui servira, il faut seulement attendre. Il ne faut plus te laisser faire de la peine par lui, tu le connais assez. Pauvre, pauvre Tatali ! Comme il faut être content qu’elle en soit délivrée. Il faudra que je lui ponde une lettre, à Max, pour le remercier de ces deux robes. Ouf, je me donnerai une chique au cherry brandy avant !!! Je suis tellement contente que tu aies eu tant de plaisir à Unterwasser, et la Banely aussi. Merci d’avance pour les chemises et pantalons que tu m’envoies, mais n’y a-t-il plus de ces Hemdhösli (sous-vêtement) comme ceux que tu m’avais déjà envoyé ? Je les aime bien car ils ne sont pas chauds. La chemise que Banely m’avait envoyée, la bleu ciel, est si longue que je vais la couper en Hemdhosen, car la porter ensemble avec le petit caleçon, est trop chaud, du moins pour Tjilatjap. Ici il fait terriblement chaud depuis une semaine, on ne sait presque pas où se mettre, c’est toujours ainsi entre les deux saisons de pluie et de sécheresse pendant un mois ou deux.
Je suis si contente que Chuggou (Loulou) ait pu aller à Kühtai (station de ski au Tyrol/ Autriche), et j’espère qu’il aura du plaisir sur toute la ligne.
Loulou à Kühtai

 Il me semble que je te vois trembler à la gare, le soir de son départ. Pauvre Mamms, qui doit toujours en passer de belles avec ses gosses !
Comment va mon Faaatherli, j’espère de tout cœur que ce n’est pas grave et qu’il se remette vite.Tu en auras soin, gäll, mon Macaroni.
Ecoute, je dois te quitter pour cette fois, il est temps d’aller à la poste. Encore mille bons….


Mon cher petit Ma-Maca-Macaca-Macaro-Macaroni
Tu m’as donné une belle frousse quand j’ai lu dans la lettre de maman que tu étais tombé et je n’ai fait que de rêver de toi pendant cette nuit. J’espère et je souhaite de tout mon cœur que tu sois bientôt remis, en tous cas soigne toi ne fais as de bêtises surtout, laisse Carnaval pour ce qu’il est plutôt que de laisser à cet accident des suites fâcheuses. Encore une fois de tout mon cœur tous mes meilleurs vœux et un extra bon muntschi de ta vieille Ge…..

P.S. Le fiancé de la Huguenin est un tout jeune qui venait aux Indes en même temps qu’elle, sur le même bateau. En parlant du type, Oscar a déjà dit qu’il ne pouvait pas le féliciter du choix de sa femme, que c’était une poupée rien de plus. D’ailleurs le type, il est sur la photo de la rysttafel Opel, à l’hôtel des Indes, celui qui est assis à côté de madame Opel, le jeune Klüwen.
Je suis contente que la nappe te plaise.
Maintenant Addio u furt, il est grand temps
Mes chers tous. Portez-vous bien…..





Tjilatjap

10 mars 1938

Mes bien chers
Si je voulais bien faire les choses, je passerais d’abord une demi heure à vous écrire merci, merci pour tout ce que je viens de recevoir ces derniers temps. D’abord le Bettjäckli  (liseuse ou figarotteli) ravissant, un petit rêve qui ne fonctionnera pas comme Bettjäckli mais bien comme ravissante petite blouse sur une jupe de même ton, avec de beaux boutons. Je n’ai pas encore trouvé l’étoffe pour la jupe, mais ne doute pas réussir la prochaine fois que j’irai en tournée avec Buby. Ensuite je dois vous remercier pour la robe noire qui me plaît infiniment et qui a déjà son histoire que je vous raconterai tout à l’heure. Elle est arrivée juste au tout dernier bon moment pour me rendre d’immenses services et m’en faire jouir d’une manière fantastique. Merci aussi pour vos lettres, Faaather et Charlot, pour faire avaler la douloureuse (la facture pour la robe) qui en effet était bien un peu plus douloureuse que je ne m’y attenais. Ensuite sont venues les deux robes de Max qui sont ravissantes aussi et qui, telles quelles me rendront bien des services. Enfin, en deux mots, mes bien chers, je me sens de nouveau comblée, comblée et gâtée à en avoir honte presque.
Mais c’est réjouissant tout de même, aussi c’est du plus profond du cœur que je vous dis merci, à chacun, selon son droit.
……M ….. mon papier vient de se déchirer. J’écris au jardin et il y a passablement de vent, mais il fait si beau, tout à fait une belle journée d’août au Chalet. Je suis seule, Buby est parti en tournée ce matin et ne rentrera que demain soir. Oh, mais zut ! J’ai tant et tant à vous raconter que je ne sais par où commencer.
Merci aussi pour tes lettres 181 et 182 mynes Mamms de mon cœur. C’est fou comme vous me gâtez toujours.

Je crois que dans ma dernière lettre je vous avais écrit que j’attendais les Engelhart. Eh bien, ils sont arrivés le samedi 26 février depuis Bandoeng avec deux jeunes chiens. C’était toute une histoire de les apprivoiser avec le mien aussi, ils salissaient partout, n’étant pas encore bien dressés. Heureusement que tante Engel avait Soe (la baboe) avec elle, qui pouvait toujours nettoyer au fur et à mesure. J’ai eu du plaisir à les revoir et eux aussi. Seulement ce plaisir a été de courte durée vu que le dimanche soir j’attendais Engelenberg avec sa femme. Ils sont arrivés dimanche pour le thé, vers 5 heures, et à 6 heures, je reçois un téléphone du A.R.(le régent) que le bateau français, le Bougainville, était arrivé et on me demandait de venir assister à la réception qu’il leur donnait au club, vu que personne n’osait parler avec ces officiers. Je dois vous dire que la robe noire est arrivée samedi soir. Moi, pas bête, j’ai vite mis cette robe et on a été au Soos, assister à cette réception qui était moche comme tout. J’ai fait de mon mieux pour mettre ces types à l’aise, leur parler etc. et à la fin cela n’a pas si mal réussi. On a fini par danser et parmi ces officiers j’ai trouvé un danseur épatant qui de son côté a aussi eu beaucoup de plaisir à danser avec moi. Seulement comme on commençait à bien s’amuser, voilà le commandant qui partait et tous les officiers devaient le suivre. Moi, je suis rentrée avec les Engelhart et les Engelenberg, n’osant pas oublier mes devoirs de maîtresse de maison. 
pavillon français!

Mais je vous assure que j’aurais mieux aimé emmener quelques uns de ces officiers. Il y en avait surtout un jeune, qui me rappelait Charlot à 20 ans. Ma robe noire a fait bon effet, je l’avais mise avec le clip en jade que Buby m’avait donné pour ma fête. C’était high-life, et les femmes m’ont presque assassinée. Enfin, j’étais la mieux et ces officiers ont tout de suite vu cela.
Le Bougainville

Nelly (la grande) et Mme Engelenberg
Le lundi 28 février je me suis occupée de mes visites toute la journée, grommelant en dedans de ne pas pouvoir aller rigoler avec les petits officiers, et surtout parler français. Le soir nous avons été au club avec les Engelhart et pendant que nous étions là, voilà 2 des officiers qui arrivent, entre autre « Charlot ». Ils étaient amenés par d’autres gens, mais ils les ont assez vite plaqués pour venir s’asseoir vers nous et rigoler en français. Nous étions en train de jouer au Monopoly, « Charlot » le connaissait aussi, le jouant à bord, à la fin j’ai gagné et pour fêter cela, j’ai amené tout le monde au bar pour leur payer une choppe et des wienerli (saucisses de Vienne). Enfin, on a bien ri et « Charlot » ne me quittait pas ! On a pris rendez-vous ensemble pour le lendemain, jouer au tennis.
Nelly avec les officiers

Le mardi 1er mars, les Engelhart quittaient le matin de bonheur pour rentrer et ma foi je ne les ai pas vu partir avec trop de tristesse. Vous comprenez que je les aime toujours comme avant, ma chère tante Engel m’a fait trop de bien pour que je l’oublie, mais cela ne s’accordait pas bien avec ces officiers, et moi je voulais profiter de m’amuser à cette occasion. Et puis j’avais encore la madame Engelenberg et entre elle et les E. il n’y avait pas trop de sympathie, enfin c’était difficile d’accorder le violon de la Gemütlichkeit (bonne ambiance). Vers la fin de l’après-midi, voilà mon « Charlot » qui arrive avec  le docteur de bord. On a pris le thé puis nous sommes allés voir un match qui se disputait entre l’équipe du bord et l’équipe militaire d’ici. A la place de sport  on a rencontré les autres officiers et vous auriez dû voir leur manège pour se rapprocher de notre groupe sans trop blesser les gens avec lesquels ils étaient assis. Après le match, Buby a proposé de faire une petite promenade en voiture, on en a entassé trois et nous sommes partis. En chemin, on en rencontre un jeune, le plus jeune du bord qui rentrait tout seul. Naturellement on l’a pris aussi, et… devinez ? C’était tout à fait Loulou, jeune, maigre, blond ! Me voilà donc avec mes deux frères, j’avais un plaisir fou et nous avons bien ri. D’ailleurs vous aurez des photos pour vous convaincre. C’était des gentlemen, vous savez, et Buby a aussi eu beaucoup de plaisir à être avec eux. En revenant à Tjilatjap, nous avons été prendre l’apéro à bord, ils voulaient absolument me faire voir leur carré, c’est à dire leur salon ! C’était gentil et heimelig. Ils voulaient nous garder à souper mais j’avais promis à Elly Oliemans de la prendre avec, alors nous sommes allés au club toute la bande où je leur ai offert un souper chinois. Nous avons joué au billard, puis mon danseur, le commissaire Jouault, a donné en solo une danse nègre, puis on l’a déguisé en jeune fille de Tahiti. Enfin on a bien ri. Quand on les a ramené au bateau, ils nous ont de nouveau demandé de venir boire un last drink et nous ne nous sommes pas faits prier !!! Le lendemain mercredi 2 mars, ils étaient invités au dîner officiel du Résident à Banjoemas. Cela leur a pris toute la journée, sauf « Charlot » qui avait trouvé un truc pour ne pas y aller. Alors il m’a invitée pour venir dans l’après-midi prendre le thé à bord, mais le soir quand j’y ai été avec  madame Engelenberg, son petit garçon et le petit Oliemans pour leur faire visiter le bateau, mon « Charlot » n’était pas là. J’ai été reçue par un tas d’autres officiers qui s’empressaient autour de nous, de sorte que je me suis dite qu’il devait y avoir là quelque chose de louche. Ils n’osaient pas me dire que « Charlot » avait dû aller tout de même et qu’il n’était pas à bord pour me recevoir. J’ai bien ri après quand j’ai eu deviné. Enfin, nous avons visité le bateau avec les enfants puis bu quelque chose au carré, quand « Charlot » est enfin arrivé et m’a fait toutes ses excuses. Ils étaient si polis tous et tellement gentlemen ! Juste quand nous partions tous les autres sont aussi arrivés et nous avons juste eu le temps de décider de faire une promenade au village lacustre le lendemain.
Il faut que je vous dise qu’ici à Tjilatjap il y a deux cliques, les gens du gouvernement et ceux du commerce. Pendant cette visite du Bougainville, les gens du gouvernement, les B.B. comme on les appelle ici, ont tout fait pour s’approprier les bons morceaux et nous tenir à l’écart, mais avec moi cela ne leur a pas réussi, car les officiers me demandaient toujours, ayant plus de plaisir avec moi qu’avec ces femmelettes qui ne savaient rien leur dire, que flirter un peu.


Enfin, jeudi les B.B. avaient donc trouvé moyen d’avoir un grand bateau pour faire  cette promenade aux villages lacustres, mais les officiers du bord ont fait préparer un de leurs bateaux et nous ont invités avec eux. Oscarli, pour cette occasion, s’est libéré  du bureau, voulant aussi être  de la partie. Moi, j’ai pris avec moi Elly Oliemans et madame Engelenberg. On a quitté le matin à 7 heures et quand nous sommes montés dans le bateau, tous les officiers se chamaillaient pour venir dans notre bateau, mais par politesse ils se sont partagés. Oh, on a bien souvent ri sous cape. J’avais pris du gâteau avec et de la limonade, c’est-à-dire du sirop de citron qui a été très apprécié. 


village lacustre
Je vous enverrai des photos de toute la promenade. On a ri, chanté, on s’est bien amusé. En rentrant, les officiers voulaient absolument nous avoir à bord pour le lunch, tous seuls, sans les autres, Buby et moi. Je n’ai pas pu empêcher madame Engelenberg d’être de la partie, c’en est une qui veut avoir le nez partout et ne comprend pas quand elle devrait se retirer. Enfin, vers midi, après nous être changé, nous sommes retournés à bord, Buby, elle et moi Nous avons été bien reçus, j’avais la place d’honneur et je vous garantis qu’on a bien ri. C’était chic, il y avait de l’esprit, c’était léger. On a bu du vin au lunch, du bon vin français, j’en ai eu un verre et demi, ils s’étaient donnés le mot pour me faire boire et pour le dessert ils nous ont offert du champagne. C’était vraiment épatant, aussi je le leur ai bien dit et ils ont eu du plaisir. Mais ils n’ont pas pu me faire boire pour me rendre stouquette. J’ai été assez maligne pour passer mon verre à Buby et ainsi leur jouer un bon tour dont ils ont bien ri. Ils savaient bien que j’étais comme il faut (et non comme il en faut !!!) mais ils voulaient tout de même essayer de me faire chanter ! Et mes deux « frères » qui étaient assis au bas de la table ! J’avais mis la robe bleu ciel, celle de Tatali à Banely et le béret bleu roi de Tatali, un bibi comme ils l’appelaient à bord ! A trois heures nous les avons quittés, Buby a été au travail et moi j’ai été dormir car le soir ils donnaient une grande réception officielle à bord. Pendant le lunch, on en avait parlé, alors l’officier en second a demandé s’il n’y avait pas un restaurant à Tjilatjap où on puisse aller souper après la réception qui devait avoir lieu de 6 à 8 heures. Je leur ai immédiatement proposé de se réunir chez nous pour un petit souper sur le pouce, ce qu’ils ont accepté.
en excursion

Le soir à 6 heures donc, la Näggeli avait remis sa belle robe noire avec un clip en brillants tout au bord du décolleté, mon collier de perles qui tombait un peu plus bas, ainsi que mon bracelet de perles. J’avais mis mon petit chapeau noir, celui que j’avais arrangé moi-même en le mettant à rebours sur la tête. Et comme il pleuvait, j’avais mis mon manteau blanc, encore celui de Hedy et qui était High-life. Cela faisait un bel ensemble noir et blanc qui leur a fait dire : Sapristi ! vous êtes bien ! Au manteau blanc, j’avais piqué deux belles orchidées. Nous sommes arrivés un peu en retard et vous auriez dû voir les femmes B.B. comme elles m’assassinaient de nouveau, surtout que tout le monde était planté là comme des piquets. « Charlot », qui devait tout organiser, avait installé un haut parleur caché dans des palmiers, alors le commissaire, mon danseur, m’a invitée pour ne presque plus me lâcher de toute la soirée. Oh, ce que j’ai bien dansé ! De temps en temps pourtant je l’envoyais se promener, mais je n’avais pas le temps de m’asseoir qu’un autre officier m’invitait. J’étais si simple, si simple (en apparence) dans ma robe noire, mais elle était si distinguée. Oh mamms, j’ai eu un plaisir fou de pouvoir être bien habillée juste pour cette occasion. Buby aussi avait du plaisir  me voir dans cette robe, elle lui plaît beaucoup, ce dont je suis bien contente. A un moment donné, le commandant est venu de notre côté, c’était un vieux zigue qui ne m’était pas du tout sympathique, alors le commissaire avec qui je dansais, m’a vite conduite de l’autre côté du pont, ne voulant pas que le commandant m’invite à danser !!! Car il disait : s’il vous a, il ne vous lâchera plus ! J’ai bien ri et d’ailleurs je ne demandais pas mieux, j’aimais mieux tous les officiers que le seul commandant. Quand c’était fini, avant de partir, j’ai dit aux officiers, alors c’est convenu vous venez chez nous. « Loulou » était de garde et venait me dire qu’il ne pouvait pas quitter le bateau, alors je lui ai fait demander une permission spéciale qui lui a été accordée, à son grand plaisir. Moi, mon plaisir n’aurait pas été aussi grand si je n’avais pas pu avoir mes deux « frères » autour de moi. Pendant qu’on décidait qui partirait en premier etc, d’autres gens ont entendu et ils ont tous demandé à venir aussi. Buby n’a pas pu faire autrement, il les a tous invités à venir chez nous, cela fait qu’au lieu d’avoir 4-5 officiers pour un petit souper froid, j’ai eu 20 personnes !!! Pendant un petit moment je ne savais pas très bien comment je pourrais m’en tirer, mais tout est bien allé. J’ai fait venir de la bière froide du club et deux djongos pour servir. Engelenberg a aussi été chercher le grand gramophone du club et nous avons eu une musique de  danse épatante. En un clin d’œil toute ma chambre était vide pour danser, pendant qu’on était assis sur la voorgalery et qu’à la salle à manger 2-3 messieurs coupaient des sandwichs, pendant que la koki faisait un immense plat de nasi goreng et que les djongos ouvraient les boîtes pour faire un merveilleux plat d’hors d’œuvre que j’avais destiné aux officiers seulement. Tout le monde avait assez bu de punch etc, à bord, ils étaient gais et avaient faim. Ils se sont jetés avec un sans-gêne formidable sur toute la bouffe, mais c’était gai et gemütlich. A boire je n’ai offert que de la bière et des whisky soda, mais tout était bien, chacun s’amusait, dansait, riait et moi je volais d’un danseur à l’autre.
J’ai dansé le Kaiserwaltzer avec « Loulou », et ma foi, c’était parfait. Il aime aussi bien la valse, j’ai dansé des tangos avec le commissaire, mon danseur en titre ( !) et des rumbas avec le capitaine, des steps avec « Charlot ». Comme c’était eux surtout que j’avais invités, il fallait qu’ils se sentent bien malgré la majorité écrasante de Hollandais dont Buby s’occupait plus spécialement. Je leur ai montré des photos des CharLou, ils ont admiré le calendrier de la Suisse Patrie, et ils ont trouvé ma maison épatante, grande et très bien installée. Le capitaine a même dit : Ah, si j’avais su, je serais venu vous rendre visite dès le premier jour et je n’aurais plus remis les pieds sur le bateau ! Ce qui était plaisant, c’est que je m’amusais avec chacun la même chose, pas de fausse note, rien, tout a été tellement comme il faut. Vers minuit les départs ont commencé, Oscar ramenait les gens sans auto, en dernier les officiers. Lors de l’arrivée au quai, ils nous ont demandé de venir encore une dernière fois à bord, cette charrette d’Engelenberg s’est faufilé avec, mais on n’en a pas pris great attention. Une fois au carré, le capitaine a été chercher sa guitare et a encore chanté quelques chansons. C’était simple et charmant, et ma robe était jolie ! Le lendemain à 8 heures, ils partaient pour Saigon avec des promesses d’écrire d’un côté et d’autre. Et ma foi, pendant toute la journée, j’ai eu de la peine à me retrouver dans la vie ordinaire !
Je suis bien contente que notre première party de quelque importance ait si bien réussi, chacun semble s’être très bien amusé : it has been a success sur toute la ligne.



vendredi 18 novembre 2016





Tjilatjap

9 février 1938

Mynes Rötteli, sau Frau  (sale femme)
Maintenant je viens répondre à tes lettres et papoter un peu. Donc vous avez bien passé Nouvel An, tant mieux. J’ai beaucoup pensé à vous et toi aussi, j‘en suis sûre. Je suis contente que tu aies eu du plaisir à ta fête, et Noël s’est aussi bien passé pour vous. Je trouve que tu méritais bien de recevoir cette bague de la Tatali (sœur de Rose récemment décédée). Que cela ne marche pas entre Fanny (autre sœur de Rose, qui travaille comme gouvernante chez Max le mari de T.) et Max, cela je l’avais prévu. C’est comme tu dis, Fanny ne sait pas s’adapter et Max non plus. Je comprends bien que la faute soit ni d’un côté ni de l’autre. Seulement si Max va se marier, qu’est-ce qui adviendra de Fanny, est-ce qu’elle ira de nouveau en place ? Ce sera dur pour elle, car malgré tout elle a eu du bon temps chez Max, elle était presque son propre maître, et chez des étrangers il y aura aussi de nouveau quelque chose qui ne jouera pas. Enfin, chacun doit vivre sa vie, on ne peut pas s’en faire pour eux.
C’est pourtant embêtant avec ta pression de sang, il te faut être très très prudente et bien suivre ton régime, mynes Rötteli. Je me fais maintenant encore des reproches plus que jamais que je ne t’aie pas mieux empêchée de faire des excès pendant toutes ces années, avec la bière et l’eau de la fontaine. Si c’était à recommencer, je te ferais bien plus sérieusement la guerre.
Le docteur vient de passer, mon mal de cou n’est pas grave, pas d’angine comme Buby le craignait. J’ai aussi donné à analyser mon caca à cause de la dysenterie, par mesure de prudence. Le docteur ne trouve rien du tout, tout est très bien, seulement il trouve que je ne digère pas assez bien la viande et me conseille de ne plus manger de viande pendant un certain temps, ni viande, ni poulet, ni rien du tout. Cela fait que je suis de nouveau au régime aussi, mais cela ne m’ennuie pas du tout. Je fais maintenant venir des légumes de deux places différentes, de sorte que j’en ai toujours à la maison.
Il paraît que toi tu es de nouveau une gondleuse (vadrouilleuse), hein ? Alors cela ne m’étonne pas que je le sois aussi !!! Est-ce que tu as eu ces gens de Birmingham  (Coxon, horlogers où Loulou travaillait) maintenant ? Et les Marchand-Dean  ont-ils daigné venir saluer ? (René et Constance Marchand, frère de Papali).
Tous les petits tableaux de Terwey (voir lettre précédente) sont dans ma véranda, ils se font très bien.
Je suis contente que Charlot se soit bien amusé au bal des officiers. Loulou est donc de nouveau à Londres, ce sale gosse, il ne m’a plus écrit depuis plus d’une année, mais ne le lui dis pas, il ne faut pas qu’il se sente forcé de le faire. Je suis contente que cela lui fasse du bien de voyager ainsi. Oh, j’aimerais bien les revoir, ces sales gosses, et voir comment ils se sont développés. Quels hommes ils sont devenus maintenant.
Donc, toi tu étais en vacances à Unterwasser (Toggenburg, canton de St Gall). 

Unterwasser SG
Je suis contente pour toi que tu puisses sortir de temps en temps, cela fait toujours du bien. J’espère que vous (Rose et Fanny) avez eu le beau temps et que tu en as bien joui. A St Gall aussi.
Je suis contente que tu aies eu du plaisir à cette nappe. Mais dis-moi, dois-tu payer de la douane sur ces paquets ? Réponds-moi là-dessus, stp. Tu ne dois pas avoir peur que j’achète trop et que je dépense trop pour toi, pas de danger, je tiens toujours mon budget en équilibre. 
Ce mois-ci nous avons reçu plus et j’ai mis de côté le plus possible, sans le dire. Est-ce que je vous avais dit que nous avons enfin pu vendre notre Fiat  (alias la Puce) pour Fl. 100.- ? L’argent est venu l’autre jour, et Buby me l’a donné. Je l’ai également mis sur le carnet d’épargne. D’ailleurs c’est moi qui reçoit l’argent et on me laisse libre d’en faire ce que je veux, « on » sait bien que j’en prends soin. Je suis contente que ce soit ainsi et que je ne doive pas demander chaque sou comme Tatali le devait, si je souhaite acheter quoi que ce soit. Je demande quand même, pour la « fassong ». 
J’ai tout ce que je peux souhaiter, si seulement je pouvais avoir un enfant prochainement, mais cela finira bien par arriver.
Alors tu fais de nouveau un couvre-pied. Tu as raison, mais merci, moi je n’en ai pas besoin. J’ai les tiens qui sont encore très très jolis, vu qu’à Batavia je n’en avais pas besoin et ici aussi je ne les emploie que très rarement, seulement quand on va dans les montagnes ou à Bandoeng.
Pour en revenir au couvre-pied, tu m’en offre un pour mes visites, tu n’y penses pas, cela serait fou de les gâter pareillement, non, non, jamais je ne leur accorderais quelque chose qui a été fait par ma Rötteli, ils ne pourraient jamais assez l’apprécier et d’ailleurs j’ai trop de monde et des gens trop différents, non, je ne veux pas commencer à les gâter.
Merci d’avance pour le Bettjäckli (liseuse) que je me réjouis de recevoir, ainsi que la robe de Hedy. D’un côté je regrette un peu qu’elle ne soit pas longue. Je n’ai pas spécifié parce que je voulais vous laisser le choix. Est-ce qu’on porte aussi des robes courtes le soir alors ? Je la veux spécialement pour aller à Bandoeng au club danser un peu après le cinéma. Enfin, on verra quand elle sera là. Est-ce que les robes de Max, je pourrai les porter pour l’après-midi ou plutôt pour le soir, vu qu’elles sont longues. Il te faut un peu me renseigner là-dessus. A Batavia, je le savais bien, car je voyais tant d’autres femmes, là il y avait toujours de la stimulation, mais ici je perds un peu le fil.
Je me suis faite une petite robe noire que je porte avec un col en piqué blanc. Elle me va à ravir, cela fait toujours jeune et le soir maintenant on peut très bien s’habiller comme en Europe, cela n’a plus besoin d’être des robes très légères.
Oui, je suis contente que j’aie pu faire cela pour Kleber, il n’est pas sain, ce type, et je ne crois pas qu’il s’entende très bien avec sa femme, en tous cas, il ne dit pas encore quand elle viendra.  Chez moi cela va mieux aussi, enfin, je te l’écrirai une autre fois, d stube isch nid gwüscht (l’air n’est pas pur ?), mais la Näggeli a de nouveau pu avoir le dessus.
Sais-tu que j’emploie toujours encore ton panier à couture, que tu m’avais acheté chez Tanner avant de partir. Il vit encore toujours et toujours, il est plein de bobines …..
Pas terminée




mercredi 16 novembre 2016




Tjilatjap

8 février 1938

Mynes Rötteli mia,
Ma mauvaise conscience m’a simplement empêchée de dormir cette nuit. Il y a si longtemps que je ne t’ai plus écrit, qu’est-ce que tu vas penser de ta Ge pourvu que tu ne te tourmentes pas, toi, qui me gâte d’une manière impardonnable !
9 février
A vous tous
Je ne suis pas arrivée plus loin que cela hier, mais aujourd’hui je ne vais pas quitter cette machine avant que cette lettre soit terminée. J’ai vraiment mauvaise conscience et des remords aussi.
exemple d'un tableau de Terwey
(Propriété C.Marchand)

Premièrement merci, merci de tout cœur pour tes deux lettres 179 et 180, pour le joli petit Terwey (tableau d’un peintre hollandais, Jan Pieter Terwey, 1883-1965, connu pour ses paysages du lac de Bienne), et pour le magnifique soulier. Rötteli, comme tu me gâtes ! Tu ne peux pas t’imaginer le plaisir que j’ai eu en recevant ce soulier qui me va comme un gant. Quelles délices de marcher sur du Bally, une fois de nouveau ! Quelle élégance, quel confort ! Je ne peux pas attendre d’avoir le second, et ils sont si jolis ! J’ai bien un cordonnier ici à qui je fais faire des soulier sur mesure pour Fl. 31.- la paire, ce qui n’est pas bien cher, mais il faut aussi voir la qualité ! Et il n’a pas encore trouvé le coup pour mon pied, pas la bonne cambrure de sorte que je ne suis jamais très bien dans ses souliers Comment as-tu réussi avec la grandeur, elle me va tout juste, pas trop grand pas trop petit, pas trop large, pas trop étroit. C’est donc 6 E. C’est drôle, dans le temps je portais toujours 5-E. Demande le no. de cambrure au magasin, ou ce qu’ils nomment la référence de la forme, et plus tard je t’en commanderai de nouveau sur cette forme. Combien les as-tu payés ? Mais, il ne faut plus me gâter ainsi, tu sais ce n’est plus nécessaire, ta Pfuttlet a maintenant les moyens !!!, oui nous les avons, nous les avons….
Merci aussi pour la carte et les bons vœux des garçons, avec les petits ours et les beaux timbres. J’ai aussi eu beaucoup de plaisir au beau calendrier qui est pendu ici auprès de notre table à écrire, de sorte que je peux toujours y jeter les yeux. Vraiment je ne sais comment vous remercier de me gâter tellement.
Je vais vite vous raconter tout ce qui s’est passé depuis a dernière lettre du 11 janvier. Le week-end du 15 janvier nous avons filé à Bandoeng, Buby et moi, et une fois de plus nous y avons eu beaucoup de plaisir. En faisant les magasins on a vu un beau manteau de pluie, et comme il me plaisait, Buby a voulu que j’aille tout de suite l’acheter, ce que j’ai fait avec plaisir. Il m’a déjà rendu beaucoup de services depuis. La première nuit nous avons logé à l’hôtel, le soir nous sommes sortis avec les van der Lee, au cinéma, puis au Soos. Dans l’après-midi j’avais été rendre visite à Mily qui a eu beaucoup de plaisir. Elle habite Bandoeng à présent, chez une famille Ruegg, des Suisses qui ont beaucoup de malchance et ne peuvent presque pas tourner. En étant en pension là, Mily les aide. J’ai aussi fait la connaissance avec ces gens, la dame est une Thurgovienne, lui, vient de Zurich je crois. Mily commence à reprendre le dessus, elle sort etc, mais elle devient s.o.s aussi. J’ai eu beaucoup de peine à la décoller, car je ne la voulais pas pour sortir avec nous, vu qu’on s’entend bien les quatre, nous et les v.d.Lee, alors cela ne va pas de trimballer une cinquième qui ne comprend pas le hollandais. Pour m’en débarrasser j’ai mis la faute sur Oscar, lui disant qu’il était de très mauvaise humeur et ne voulait voir que son ami etc. Enfin, cette pauvre Mily commence à croire qu’Oscar est un ogre, et que je dois terriblement danser selon sa pipe.
Rentrés de Bandoeng nous avons été invités de droite à gauche, entre autre chez les van der Meer, de la Borsumy et en même temps agent de la Rotterdamsche Lloyd & Cie de bateaux. Chaque fois qu’il y a un bateau nous sommes invités à bord, c’est très chic, et bien gai quelques fois.
Ensuite j’ai de nouveau eu Mr. Kiers, pour la Mexolie, il est resté quelques jours. Une visite que je n’aime pas beaucoup, mais qu’est-ce qu’on veut ! Ensuite mon djongos a été malade pendant une semaine, ce qui était embêtant, vu que cela dérange tout le train de ménage.
Dimanche passé, donc le 30 janvier, nous étions en train de boire notre tasse de café matinale, voilà qu’un officier de marine s’amène. C’était un ami d’Eddy (frère de Oscar), qui fait quelques voyages comme docteur de bateau avant de s’établir. Nous l’avions justement encore vu à Batavia avant de partir pour Tjilatjap, et maintenant que son bateau s’arrêtait ici, il n’a pas oublié de nous rendre visite. Nous avons eu beaucoup de plaisir ensemble. C’est quelqu’un avec qui je pouvais parler et discuter ouvertement sur bien des sujets, vraiment un peu comme si cela avait été Eddy lui-même.
Entre temps, le 31 janvier, une princesse est née (Beatrix de Hollande) et les fêtes ont commencé. Zut, quelle déception d’abord parce que c’est de nouveau une princesse, mais les gens se consolent en pensant qu’elle peut avoir des successeurs ! On a fêté pendant 3 jours ici, mais il paraît que Batavia a été en liesse comme jamais avant. Samedi passé nous avons eu le gala bal, Buby en smoking et la Ge avec sa belle robe. C’était très bien, nous avons été demandé à recevoir le Resident qui venait de Banjoemas pour cette occasion. Quand il  est arrivé on a joué le chant national ensuite on l’a conduit à sa place et il a tenu un discours patriotique, après quoi on a ouvert le bal avec une polonaise. Pendant une bonne partie de la soirée j’ai dû m’entretenir avec lui, mais à la fin on a quand même trouvé moyen de s’esquiver pour aller s’amuser et boire avec nos connaissances. J’avais décoré le Soos qui a eu beaucoup de succès. Il y a aussi eu des photos, si elles ont réussi et que je sois dessus, je vous en enverrai. Oscar m’a dit que j’avais été la mieux dans ma belle robe et que j’avais reçu bien des regards jaloux, ce que je n’ai même pas remarqué. Le soir avant le bal nous avons été invités chez le Regent où il y avait des danses javanaises. C’était bien aussi, seulement il n’y a pas eu beaucoup d’ambiance vu que les femmes, en des occasions pareilles, sont toujours séparées des hommes.
Ouf, et voilà enfin le calme revenu, mais pas pour longtemps, vu qu’à la fin du mois il y a ce bateau français, le Bougainville, qui vient ici pour 5 jours. Vous pouvez penser comme je me réjouis de rigoler avec ces officiers et de parler français. En même temps j’aurai la femme d’Engelenberg qui arrive et les Engelhart qui passeront par ici à leur retour de Bandoeng et resteront 2-3 jours. Je vous dis, j’ai toujours la maison pleine de gens. Pour la soirée du bal samedi passé, j’ai aussi un ancien copain de Buby de Poerwokerto qui venait pour le bal et passait le week-end ici. Heureusement que j’ai dressé la baboe pour qu’elle prépare la chambre de visite sans que je n’aie plus à m’en occuper.
Hier soir il y a eu ici une vente aux enchères de gens qui partent en congé, alors Buby m’a acheté un coucou. Il l’a payé Fl. 7.- ce qui est beaucoup trop à mon avis, mais tant pis, nous en avons du plaisir, c’est heimelig au corridor à présent. J’ai aussi acheté des oies !
Ce matin je me suis réveillée avec un fort mal de cou et maintenant Buby vient de me dire que le docteur va venir. Ce sale type lui a téléphoné sans que je le sache. Je suis furieuse.
Sans cela la vie va son train, Buby joue toujours du piano, il fume trop et ne veut jamais aller promener un peu, il ne marche plus du tout et devient gras comme un cochon ! Je lui ai déjà dit qu’il ne me plaira bientôt plus !
J’ai aussi eu beaucoup de plaisir à ta lettre mon cher Chou-fleur (son papa). Tu auras une réponse sous peu.
Mes chers, maintenant vous êtes de nouveau au courant de ma vie ici et je vous promets de ne plus vous faire poireauter si longtemps. Dimanche prochain j’ai un jeune homme qui vient de Keboemen pour le week-end, alors je vais arranger une rijstaffel d’hommes. Au mois de mars j’aurai encore une fois Mily pour 2-3 semaines et pour Pâques les v.der Lee. Wim va apporter son violon et on fera de la musique, ce sera joli.
Mes bien chers tous, pour cette fois je termine avec un bon muntschi pour chacun, toutes mes pensées affectueueses et toujours all the best

Une lettre à maman suit, je ne suis pas arrivée à la finir
Ge… et son Bibybu !!!