lundi 29 août 2016




Batavia

9 février 1937

Triple sale femme! (à sa maman)
Enfin, je puis parler librement, comme j’en ai l’habitude. Mais tu es et tu restes une sale femme.
Je ne me rappelle plus si je t’ai jamais remerciée pour la brosse à cheveux, si belle, douce, et dans laquelle se trouvaient encore quelques fils d’argent de la Rötteli. Merci mille fois, j’en ai beaucoup de plaisir et me brosse régulièrement les cheveux, toutefois très doucement, sans trop presser. J’ai aussi reçu en son temps la petite chemise avec les pantalons. La qualité est bien bonne, mais la coupe ne me plaît pas trop. Ce n’est pas assez décolleté, alors cela dépasse toujours des robes, mais je pourrai bien l’employer quand il fera frais et que je porterai l’une ou l’autre robe fermée, au cou. Les pantalons aussi seront bon pour quand il fera plus frais, autrement j’aime mieux avoir le bi-ba-bu (le popotin) un peu aéré !!!
Dans ma dernière lettre je ne t’ai pas écrit ce que j’aimerais que la jeune Huguenin m’apporte. Je ne sais pas si cette lettre arrivera trop tard, parce que si elle est ici en mars, il faut qu’elle soit presque partie de Bienne déjà. Entre nous, je ne serais pas étonnée qu’elle vienne ici pour se trouver un mari, car son oncle doit aussi savoir qu’il y a tellement de jeunes gens ici qui ne demanderaient pas mieux que de se marier, surtout avec une jeune fille toute blanche ! J’ai déjà souvent pensé, si seulement je pouvais avoir Flock ici, mais cela ne va pas, et après tout je ne veux pas me mêler de ces choses-là. Plus on cherche à se marier, moins on trouve.
Tu as raison, va toujours te promener, cela change si bien les idées et c’est si sain. Le docteur m’a aussi recommandé de beaucoup aller promener.
Je trouve que c’est tellement dommage que tu ne puisses pas aller à Rome. Est-ce qu’elle n’a pas écrit quand tu pourras y aller ?
Tiens, je viens de m’apercevoir que c’est Carnaval aujourd’hui. Est-ce que Bienne est en fête, ou bien est-ce qu’ils ne font pas grand chose les gens ? Quand je reviendrai il me faudra des fastnachschuechli (merveilles), Minna ferait bien de s’exercer déjà maintenant à les faire, car toi, une fois que je serai là, tu n’auras pas le temps de rien faire !!!
Oui, je bois beaucoup de camomille et aussi du thé d’ici. Il y a tant de bonnes herbes ici et des thés qu’on emploie aussi dans les remèdes en Europe. Je t’assure que je me soigne bien.
Papa W. a donc bien vendu les Wilde Zwanen, mais avec 80% de perte, il semble furieux dans sa lettre, c’est à comprendre. Quoi qu’il en soit, c’est encore mieux ainsi que d’avoir cette maison sur le dos, cela coûtait trop d’impôts. Son logement permanent est à Bruxelles maintenant, il a loué un flat dans un hôtel. Son adresse est : Quartier Clovis, 37B Residence Palace, rue de Loi 155, Bruxelles.
L’adresse de Cunégode (surnom de Coen, le frère cadet de Oscar) est : c/o The Theosophical Society, Adyar, Madras, Br. India
Loulou l’avait demandée en son temps, mais quand je lui ai écrit je ne l’avais pas encore. Veuille la lui donner de ma part.
Ce soir je me sens déjà bien mieux. Je vais encore me dorloter pendant quelques jours. Je pense que je me suis trop fatiguée en allant faire des commissions avec Margot.
Oh, je me fais un chapeau. Dans les patrons du Jardin des Modes il y en avait aussi un pour un chapeau, et moi, pas idiote, je l’ai directement acheté. Les dames autour de moi (après la leçon de malais) étaient étonnées que j’ose ainsi me lancer à faire un chapeau, mais ceux de Paris savent donner de si bons patrons. Ce chapeau n’est qu’une petite toque, perchée sur la tête, pointue. Je la fais en crêpe brun foncé, de la même couleur que mes cheveux, ainsi cela ira avec tout. Tu sais ce sera un petit bibi, je l’ai coupé dans un vieux pyjama de Buby pour essayer d’abord et il me va très bien. Hm ! Hm ! Avec ce béret de Tatali, tu sais, ce bleu que tu m‘as envoyé, je ne l’ai encore jamais porté parce que cette forme ronde ne m’allait pas, pourtant le béret est beau, on voit qu’il était cher et je trouvais dommage de ne pas le porter. Maintenant j’ai tout à coup eu une idée lumineuse, j’ai été le mettre sur mon modèle, j’ai plié ici, donné un coup de poing là et maintenant c’est devenu une jolie petite toque, vaguement modèle turban, tricorne. J’en suis très fière, Buby, quand je le lui ai montré et fait croire que c’était un chapeau cher, l’a cru. Il le trouve très bien. Chic ! Maintenant j’ai un joli chapeau pour mettre avec cette robe bleue de Tatali, et les beaux gants de peau. Tu vois que cela me fait un ensemble très bien. Oh, je te dis…

Je te quitte pour ce soir, je vais vite aller coudre le chapeau avant qu’il ne se déforme. Mille bons muntschi …..

jeudi 25 août 2016





Batavia

7 février 1937

Je vous écris aux sons de « Grossmütterchen », une de mes mélodies préférées depuis que je l’ai une fois entendue à Bâle, un beau dimache matin, et depuis elle me rappelle la plus gentille, la plus dévouée, la plus chère des Grossmütterchen, celle qui nous a quitté il y a 6 ans maintenant. J’ai beaucoup pensé à elle ces jours-ci, et la nuit passée j’ai aussi rêvé d’elle constamment. Elle est venue m’embrasser et je l’ai reconduite dans sa Stübli.
Comme vous voyez, j’écris de nouveau à la machine, car je vais mieux. J’ai commencé de me lever vendredi et hier nous avons été en ville puis au cinéma, mais là il faisait si chaud et il y avait tant de fumée que j’ai eu un moment de faiblesse, mais ce n’est rien, cela passer sitôt que j’aurai été dehors un peu.
J’ai de nouveau eu des histoires de baboe, cette As que j’avais, m’a quittée. D’abord elle m’a dit qu’elle était malade et qu’elle ne pouvait pas faire tout ce travail ici ( !) et ensuite elle s’est vendue en disant qu’elle entrait au service de Mimi. Moi j’ai sauté car je savais très bien que Mimi ne l’avait pas engagée, de plus Mimi ne me ferait jamais cela, me voler ma baboe, surtout encore que c’est elle qui me l’avait procurée. J’ai téléphoné à Mimi qui n’en revenait pas. Il se fait que As a arrangé la chose de son propre gré, vu que Mimi attend un baby, il faudra bien qu’elle prenne une seconde baboe, alors As s’est dit qu’elle voulait prendre cette place d’assaut, vu que sa mère est déjà chez Mimi, mais maintenant Mimi est tellement fâchée de ce toupet qu’elle en prendra une autre. Bah, c’est passé, j’en ai une autre maintenant qui a dit qu’elle savait cuire et qui ne le sait pas, mais je m’en moque.. Je ne m’en fais plus et si elle ne me plaira pas elle partira aussi. Il reste toujours encore la petite Anna, une gamine de 12 ans environ qui apprend très vite. En ce moment c’est elle qui fait mon poulet du dimanche, elle a tellement bien saisi le truc en me regardant faire 1-2 fois qu’elle peut s’en tirer toute seule. C’est ainsi pour tout, cette petite est fantastique. Espérons que cela va durer !
C’est tout à fait un dimanche de pluie aujourd’hui. Buby est un peu enrhumé, il est assis sur le divan à lire et étudier son catalogue de timbres. Hier samedi, il a joué aux timbres toute l’après-midi, ensuite Frank et Margot (van der Stock)  sont venus et nous avons été ensemble en ville. Ils voulaient acheter des chaises et on a fait les magasins ensemble, ensuite nous avons été au cinéma, à la première présentation à 7 heures. En rentrant on a soupé sure le pouce de pain frais, beurre frais et de bons croissants frais, confiture, fruits et moi un bon bouillon. C’était si bon que je ne pouvais plus m’arrêter de bouffer. Ce matin on est resté au lit jusqu’à 10 heures, à lire, à faire les paresseux, il ne manquait plus que Minna avec une ration de Schnitteli !!!. Nous en avons remanger, du pain et du beurre, et moi 2 bananes et Buby une demi noix de coco. Cet après midi à 5 heures nous irons à une matinée de cinéma, un vieux film que nous n’avons pas encore vu, il fera bien l’affaire.
Pendant que j’étais malade, la mme Bos est venue me rendre visite. Elle a bon cœur une fois qu’elle réussit à surmonter sa jalousie. Espérons que cela dure.
Cette semaine Buby a dû aller chez Mr. Jöbsis pour l’une ou l’autre affaire, alors Mr. J. lui a demandé de mes nouvelles et m’a fait bien saluer. Je trouve cela très gentil, hein ?
Ils ont reçu au bureau le premier courrier de Bigot. Il existe quelques malentendus entre les affaires de la Mexolie et Amsterdam, alors Elout et Oscar aussi, tous comptaient sur la visite de Bigot à Amsterdam pour mettre les choses au clair et rétablir la bonne entente et voilà qu’il semble, d’après cette première lettre de Bigot, qu’il n’a rien fait du tout, mais même qu’il a passé dans l’autre camp, et semble aussi condamner les choses ici. Cela leur a bien foutu les bleus aux hommes ici. Ils ne savent plus bien s’ils doivent encore faire confiance à B. ou pas. C’est sûr qu’il faut tenir compte que chacun qui va en vacances en Hollande ne prend plus les affaires bien au sérieux, et secondo chacun regarde aussi pour son propre profit avant tout. Enfin, qui vivra verra, on ne peut pas juger d’après une première lettre.
Je me suis de nouveau levée mais je ne me sens pas encore bien, je vais retourner chez le docteur. C’est de nouveau un temps où tout le monde a la grippe ici, partout, partout on entend les gens se plaindre, alors…. je pense que je ne dois pas faire exception !!!
Hier j’ai été faire des commissions avec Margot van der Stock. On a bien ri les deux et passé en ville toute la matinée. C’est quand même chic d’être  Batavia, bon sang !
Buby devient de plus en plus fou pour ses timbres, il passe ses soirées à laver des timbres au lieu de travailler, le miston ! Il en a reçu quelques vieux d’un chinois, il va t’envoyer les doubles, Faaather ! C’est les chinois ici qui sont grands collectionneurs, c’est fou. Il m’a demandé de vous dire un tas de choses concernant ses timbres mais je ne me rappelle plus très bien. Une chose c’est que tu ne dois plus écrire tes adresses à l’encre rouge, car elle déteint trop en lavant les timbres et cela les tache. Et Faaather, quand tu en laves pour nous, une fois qu’ils sont secs il faut les frotter avec un peu  de talc pour qu’ils ne collent plus, car même quand ils sont bien lavés, il reste toujours encore un peu de colle et avec le climat humide d’ici tout se recolle. Ceux que tu lui avais envoyés il a fallu qu’il les trempe tous pour les dégager. L’autre soir, assise près de lui, je cousais et ne m’occupait pas de lui, alors tout d’un coup mes narines ont été agréablement chatouillées par l’odeur d’un suave parfum. Je me dis, qu’est-ce que cela peut bien être, est-ce la femme d’en dessous qui s’est parfumée à l’excès ? Je lève les yeux et vois mon miston qui frotte ses timbres avec du talc parfumé ! Non, est-ce que ce n’est pas un peu fort ? Il trouvait cela beau et bien !
Je viens de recevoir une merveilleuse gerbe de glaïeuls de Mimi. Elle voulait venir chez moi ce matin, mais comme je crois que ma grippe n’est pas encore tout à fait passée, elle n’ose pas s’exposer à la contagion, vu son état (enceinte). Je trouve si gentil de sa part, je vais lui téléphoner pour la remercier. Vraiment je suis en train de me faire de très bonnes connaissances, cette Margot aussi m’est très sympathique et je sens qu’elle m’aime aussi Je viens aussi d’avoir un téléphone d’Annie Elout, bien qu’on ne les voie plus si souvent parce qu’Oscar n’a plus le temps d’aller se balader le soir et eux ne sortant pas non plus, on reste toujours bons amis. Elle a de nouveau beaucoup de soucis à cause de cette affaire avec Bigot, pour Frank. Je ne sais pas, mais c’est comme s’il nageait dans un courant contraire, Frank Elout, tout semble contre lui et il est pourtant si intelligent qu’il mériterait d’être mieux apprécié. Annie est naturellement aigrie et je pense bien qu’elle l’est un peu contre nous aussi puisqu’Oscar semble mieux vu à la Banque pour le moment. Bah, c’est la vie, elle est difficile pour tout le monde.
Cette année, la Banque donne  du dividende, alors je pense qu’il y aura aussi un petit cadeau pour nous peut être un mois de salaire extra. Les employés de la Banque recevront des tantièmes, mais comme nous sommes de la Mexolie, on n’a pas cette chance. Tant pis. Je serai déjà contente avec cela.

Fiat Balilla 1936
 On aimerait tant se payer une auto, car la nôtre en arrive à son dernier souffle. Je pense que notre choix tombera sur la Fiat Balilla, comme étant la plus économique et selon Charlot, pas trop mauvaise de construction. Mais avant que nous ayons l’argent en main, il n’y a rien de fait, car nous voulons rester sans dettes.
C’est tordant, pendant que je vous écris, je vois ici sous ma fenêtre un vendeur de fruit qui a mis un vieux chapeau de femme en paille blanche. Il en est très fier et ne comprendrait pas qu’on puisse se moquer de lui. C’est des enfants tout de même.
Mes bien chers, addio pour cette fois


lundi 22 août 2016






Batavia

19 janvier 1937

A sa maman
Il est inutile de te dire combien ta lettre 151 m’a de nouveau fait plaisir. Je vais faire de mon mieux pour t’écrire un peu plus souvent de nouveau. Je sais que je vous ai négligé bien des fois, mais c’est la vie ici qui m’en a empêchée au commencement. Maintenant que je sais que très probablement nous y resterons, je ne suis plus si  anxieuse de sortir et aller jouir, tu comprends. Maintenant je passe au moins deux-trois matins par semaine à la maison.
Ma Röttelio, ce que tu es de nouveau jolie dans ta belle robe ! Zum frässe (à bouffer), et les rides, tu n’en as pas tant. Attends quand tu me verras ! j’en ai presque plus que toi. J’ai beaucoup vieilli ces derniers temps, je pense que c’est surtout ces troubles d’estomac qui ont fait cela. Enfin, zut, on ne peut pas toujours avoir 20 ans.
Je suis contente que vous ayez eu la Giggerli et qu’elle ait eu du plaisir. Je pense bien qu’elle est toujours la même, mais que veux-tu, on ne peut plus la changer. Comme je peux bien me représenter le temps qu’il faisait quand vous avez marché à Sutz. Un bel hiver est quelque chose de beau aussi, et j’en jouirai bien quand j’y serai de nouveau, mais pour le moment je n’en ai pas l’ennui. Mais non, car je suis heureuse ici. Pourvu que tu ne te sois pas trop fatiguée en marchant à Sutz et que cela n’ait pas eu de mauvaise conséquence.
Là sur la photo où vous êtes les trois, on voit pourtant bien la différence d’une robe bien faite. Je trouve celle de la Bänggu pas belle du tout, est-ce qu’elle l’a faite elle-même ? Ah, tu es bien, toi.
Je ne savais pas non plus que la Raball avait eu une fille, vu qu’il y a plus d’une année que je ne lui écrit plus. Je pense bien que cela lui aura fait de la peine, pas parce qu’elle m’aimait, mais surtout parce qu’elle tenait à gaggle avec une amie à Java. Bi mir isch wieder ds röteli, es isch es donners züg dass es nie wot ufhöre mit cho, i hätt ou gärn nes chlyses  (j’ai de nouveau mes règles, c’est une sale affaire qui ne veut pas arrêter, j’aimerais bien moi aussi un bébé….)
Est-ce que tu as déjà reçu les étoffes de Max ? Demain avec Mimi j’irai aussi m’en acheter quelques-unes pour des petites robes toutes simples, surtout pour rapprendre à couper sur mon mannequin, car j’ai un peu oublié depuis mes leçons chez la Lenderli, mais je pense bien que cela reviendra. Il faut que je m’exerce.
Maman, je te quitte vite pour aller surveiller mon dîner. J’ai une soupe à la farine brune avec les restes du poulet de dimanche, deux têtes de salade en sauce, des patates, des Wienerschnitzel et des fruits. C’est fou ce que j’aime cuire avec ces nouveaux livres.
Voilà, ma soupe à la farine est faite, sans grumeaux, parce que je l’ai passée au tamis. J’aime tellement cuire maintenant, encore plus parce que je puis le faire avec tellement de sûreté, grâce à ce livre. Si jamais tu vas une fois chez Maegli (librairie à Bienne, aujourd’hui disparue), tâche de pouvoir y jeter un coup d’œil, il te le permettra bien. Tu verras et comprendras pourquoi j’en ai tellement de plaisir. Et tout partout il y a des images qui te montrent mieux que n’importe quelle description comment il faut t’y prendre. Et le livre ne dit pas : il faut prendre tant et tant, mais, prenez telle quantité, faites cela comme ceci etc ; c’est comme si quelqu’un te parle personnellement. C’est même Buby qui en a du plaisir, il lit souvent là-dedans.
Je me suis faite ma première robe sur mon mannequin (le buste !!!), une petite robe de piqué blanc qui me revient à Fl. 2.40, mais elle n’est pas trop bien réussie, il lui manque encore le chic. D’abord j’étais très découragée et abattue parce que j’étais désappointée, mais après réflexion je me suis dit que cela ne pouvait pas réussir du premier coup et me suis rappelée que « en couture l’expérience fait le maître ». Je veux bien le croire, c’est pourquoi je vais m’exercer.
Ma baboe va maintenant suivre un nouveau cours de cuisine, que je lui ai payé. Je ne le fais pas tant pour lui apprendre à cuire que pour lui faire avoir du plaisir à cuire, car je trouve que c’est une chose essentielle. Cuis avec amour ! Je t’en garantis que la femme Bos, dimanche soir, était jalouse de moi parce que j’allais ainsi faire du café pour ces jeunes gens, je crois qu’elle ne sait pas même le faire, et elle ne veux pas l’apprendre.
Je suis bien contente que tu m’aies toujours poussée à apprendre à coudre, et de tous tes bons conseils que tu m’as donnés au cours des années. Papa a beau dire que tu me gâtais, mais c’était de la bonne manière, car maintenant je me rappelle surtout mos bonnes conversations, sur la vie etc. Pense ce que cela m’est utile maintenant.
Je te dis, je suis si contente que cela soit arrivé avec ces jeunes gens, car Oscar ne pouvait pas souffrir ce Schröder au début, et je crois bien  que Schröder n’aimait pas non plus Buby, et maintenant cela semble bien aller, il faut seulement encore que je soude un peu la chose. J’ai immédiatement rempli mon buffet de boîtes de thon, sardines, asperges, petits pois, lait condensé etc, parce qu’après huit heures on ne plus rien avoir ici,  et du lait je n’en achète que tout juste pour chaque jour vu qu’on ne peut pas le conserver.
J ‘ai tellement envie d’un fourneau à gaz avec un four, un grill. Jusqu’à présent je cuis seulement sur deux flammes à gaz. Peut être que le mois prochain je vais louer un fourneau à raison de Fl. 1.- par mois. Ce n’est pas trop cher pourtant. Je ne veux pas en acheter un, quoiqu’il y en ait de très jolis, tout petits et bien comme prix, mais à quoi bon dépenser tant, et ce serait toujours un meuble de plus à trimballer. Si je savais que nous restions ici pour tout de bon, mais on est jamais sûr. Ce Bomas par exemple est envoyé tout au nord de Bornéo le mois prochain, à Pontianac. Il a déjà été à Bombay, Calcutta, Shanghaï et il s’attend à être envoyé au Japon aussi. Ah vois-tu ces jeunes qui voyagent, c’est quand même beau. J’aimerais tant que les garçons aient aussi cette chance tu sais, pas voyager pour vendre des montres seulement, mais  encore aller travailler dans ces pays lointains chez Stern ou Bloch & Gerber, et qu’ils soient soumis à cette discipline sérieuse du travail dans l’Orient. Hé, Mamms, il est vrai que je suis séparée de toi, des miens, de la maison, mais il fait si beau ici aussi, c’est une vie qui me va tellement, qui me rend heureuse comme je n’aurais pas pu l’être à Bienne ou dans un petit patelin en Suisse. Ici c’est large, cela a du Schwung (de l’élan), de la jeunesse, de la vitalité.
Ecoute, je vais terminer, je dois encore écrire à Papa Woldringh et aux Bigot qui sont en Hollande maintenant. Ils ont aussi passé par la Suisse, mais je ne leur ai pas dit de venir vous voir, ne voulant pas te donner du Gstürm (stress) de nouveau.
Ce matin, en écrivant j’ai vu l’avion passer au dessus de la maison, il était si joli et m‘a fait tant plaisir, mais après réflexion je me suis dit qu’il ne pouvait tout de même rien apporter vu que je venais de recevoir ta lettre 151, mais voilà à 3 heures il y avait une lettre de la Rötteli.
Donc c’est sérieux, ce départ pour Rome ? C’est de tout cœur que je te souhaite du plaisir et de jouir autant que possible. Mais ne te fatigue pas trop. Comme je voudrais être avec toi. Naturellement tu ne perdras pas ton temps à m’écrire, profite et jouis bien de toutes ces beautés. Tu pourras toujours assez m’écrire une fois de retour à la maison.
Merci pour le conseil des bouillons Maggi. Je ne les ai pas encore vu ici, mais cela ne tardera pas. Le temps d’exécuter les commandes et de les expédier ici. Dans ces choses-là il faut toujours compter 2-3 mois de retard sur l’Europe. Tu n’as donc pas besoin de m’en envoyer. De plus grâce à mon livre, je sais comment faire du bon bouillon maintenant, pour 30 cent j’ai un poulet, mais j’achèterai aussi ces Maggi car ils sont commodes quand on veut faire vite.
Tu m’écris encore que je ressemble à la Strittere, eh bien, je ne me considérerai plus comme ta fille, de sorte qu’il ne sera plus nécessaire que je t’écrive ! hein ! tu es quand même une sale femme, plus méchante que je ne croyais, vraiment c’est encore une illusion qui s’en va, Rötteli-mistonne ! (entre nous on se comprend toujours, hein ? et je n’ai rien contre que tu te moques de moi, j’en fais de même).
Comme je suis contente que tu aies trouvé de si beaux souliers. Tu as raison, fais-toi jolie, tu ne le seras jamais trop pour moi.
Oui, je remercierai Max à l’occasion pour cette robe bleue. Je l’aime d’autant plus de penser que c’est la Tatali qui la voulait pour elle. Je dois y penser de plus en plus à la Tatali, c’est vraiment maintenant que je sens le plus fortement qu’elle nous a quittés et je t’assure que cela me fait pleurer quelquefois, du moins verser quelques larmes quand je pense à elle ou que quelque chose d’elle me vienne à l’idée.
La semaine passée j’ai fait des Chnöpfli pour la première fois avec ma jolie passoire et j’ai tellement dû penser à la Tatali que cela m’a fait pleurer. Vous, vous l’avez perdue d’un coup, d’un jour à l’autre elle n’était plus là, mais pour moi c’était plus lent à réaliser Je comprends combien le coup a dû être terrible pour toi.
Enfin, va à Rome et jouis-en, mais ne tombe pas trop souvent amoureuse, car tu en verras des beaux Tschingg (mâles italiens…). Tu les regarderas pour moi et tu te rinceras l’œil, hein !
Et maintenant je vais te quitter, c’est déjà tard et j’ai sommeil. Buby est assis vis-à-vis et travaille.
Encore une fois …et beaucoup, beaucoup de plaisir à Rome.

Mes chers
Je viens de recevoir la lettre 152 de maman, contenant le formulaire de procuration à signer, que je vous renvoie inclus puisque c’est pressant.

Sutz 1936, l'église et le Chalet tout à gauche

Je te remercie aussi Loulou d’avoir eu l’idée de m’expliquer de quoi il s’agit et te serais reconnaissante de m‘en laisser savoir plus long à ce sujet. Est-ce que c’est nécessaire que vous vendiez ce terrain ? (parcelle à Sutz). Je croyais d’après une lettre de maman que vous en aviez loué une partie. Quelle partie est-ce ? Et quelle partie voulez-vous vendre maintenant ? Et où se trouve cette plage (aujourd’hui la petite baie publique) dont maman m’a parlé, mais hélas, jamais bien clairement ni surtout suffisamment pour me permettre de me faire une idée nette des changements survenus à Sutz (le terrain allait du Chalet jusqu'au lac). Le fait d’être mariée et expatriée n’est pas une raison pour que je ne m’intéresse plus à Sutz et ce qu’il en devient. Au contraire, et comme déjà dit, je serais reconnaissante à l’un de vous de me mettre au courant.
Sans autre pour cette fois, je vous embrasse bien fort tous les deux.
P.s. Charlot ne m’en veuille pas de mon long silence, patiente encore un peu et je t’écrirai longuement aussi.




samedi 20 août 2016





Mes bien chers, hé non ! il faut d’abord la date !

Batavia

17 janvier 1937

Mes bien chers donc
C’est avec un plaisir immense et profond que j’ai reçu vos photos. Ce que tu es bien Mamms ! Tu es simplement chic et j’aime extrêmement bien ta robe. Je la trouve High life et celle te va rudement bien. Tu le diras à Hedy, je suis contente d’elle. Aussi, la photo de vous trois est bien, elle est si digne cette photo à trois, je l’aime beaucoup. 
de gauche à droite
Fanny (Bannely) Giggerli et Rose


Lundi, le 19 janvier 1937. J’ai interrompu ma lettre dimanche pour aller dîner, et après notre sieste nous avons été prendre le thé sur la terrasse du flatgebouw ( trad.lit. =le bâtiment des appartements). En y allant je voyais dans un flat au-dessous, deux jeunes gens de la Banque qui marchandaient pour des fleurs. Ils le faisaient plus pour leur plaisir de marchander que pour acheter des fleurs. Moi aussi cela ma fait rire et un moment après voilà Schröder (celui qui était assis à côté de moi au dîner des Jöbsis) qui monte et m’offre les fleurs qu’ils avaient achetées. J’en ai eu du plaisir et un mot a donné l’autre, j’ai pris mon plateau de thé et nous sommes allés chez Bomas (un autre jeune de la Banque, qui a son flat à côté de celui de Bos) pour une tea party. Il y a quelques temps que ce Bomas demeure ici, mais je crois que la femme de Bos nous a un peu décrié chez lui, de sorte qu’il ne semblait pas vouloir entamer des relations avec nous, et moi je ne lui courrais pas après, naturellement. Bon, enfin, nous nous entendions bien et avons fini par bien rire. Au thé succéda l’apéritif et comme il n’avait plus de whisky je lui ai prêté le mien. Vous auriez dû voir la gueule de madame Bos quand elle m’a vue là. Elle a salué les hommes, mais pas moi. Jalousie ! à un moment donné j’ai été chercher des pistaches, des biscuits salés et des cornichons, des choses qu’on offre ici avec l’apéritif. Ces jeunes aimaient bien cela et devenaient de plus en plus gais, jusqu’à ce que Bomas invite aussi les Bos à venir s’asseoir chez nous. Moi  je riais sous cape quand madame Bos refusait à tout prix, mais à la fin elle a quand même dû céder et avec un gentil sourire je lui offrais des biscuits. Haha ! Vers 10 heures on a décidé d’aller souper chez le Chinois, tels que nous étions, sans chapeau, les hommes sans col ni cravate. Ils n’étaient plus tout à fait sobres et j’ai eu la frousse dans l’auto quoiqu’Oscar faisait attention aussi à ce que Schröder faisait. Les Bos étaient avec Bomas. Là au restaurant chinois il a fallu que nous rencontrions Wittkopp, le type qui a vendu Elout à Amsterdam. Bomas ne semblait pas l’aimer non plus, de sorte qu’il l’a chicané et taquiné tant et plus. Il avait une chique assez lourde et ne savait plus ce qu’il disait par moment. Enfin, il était très gai et nous avons ri à en avoir les larmes aux yeux. Ce Wittkopp a reçu sur le chourave d’une façon formidable, nous le lui accordions tous au fond du cœur. Moi je faisais de mon mieux pour faire manger les hommes, je me disais que cela dissiperait l’alcool, mais chez Bomas je n’y réussissais pas, de sorte qu’il continuait d’amuser tout le café. Il y avait des vendeurs de ballons qui passaient toujours devant la terrasse du café, alors Bomas les achetait tous seulement pour le plaisir de les faire péter. Oh, je vous dis, nous avons bien ri. A minuit nous sommes rentrés, non sans presque avoir eu un accident avec un taxi. Bah, j’ai eu la frousse et j’ai fait une prière quand j’ai enfin pu sortir de l’auto. On en m’y prendra plus, quoique Schröder ne conduisait pas mal, mais c’est Bomas qui faisait la bête. Une fois devant la maison je leur ai demandé de monter chez nous prendre encore une liqueur, mais j’ai placé des tasses de café noir devant eux, et ils m’en étaient bien reconnaissants. Surtout à Schröder, je lui en ai enfilé 4, vu qu’il devait encore conduire pour rentrer. Bomas disait à tout bout de champ : Et dire que je demeure ici depuis 6 semaines sans avoir découvert combien vous étiez gentils. Bon sang, ce que j’ai perdu ! Il disait tout cela devant la madame Bos qui pouvait en prendre un nez plein.  Les enfants et les hommes saouls disent la vérité !!! Enfin, à 2 heures ils ont débarqué et chez nous une nouvelle comédie commençait. Oscar sitôt au lit, s’est mis à faire une drôle de tête et bientôt il était penché sur les cabinets !!! une fois retourné au lit, il ne voulait plus en sortir et réclamait une cuvette. Moi cela me fâchait, je veux bien le soigner sans réserve quand il est malade, mais s’il veut boire jusqu’à en dégueuler, il est libre de le faire mais qu’il m’en épargne les conséquences. D’ailleurs vous savez  bien que je ne peux pas souffrir un homme chiqué à ce point, aussi je n’ai pas pu me retenir de lui dire mon opinion. Pendant ce temps il devenait malade de plus en plus, mais je ne m’en occupais plus. Le lendemain matin il ne se sentait pas bien, mais il fallait pourtant qu’il aille au bureau. Il en est revenu vers 10 heures avec des crampes très fortes, alors je me suis rendu compte qu’il devait avoir mangé quelque chose de mauvais. Je l’ai mis au régime du lait et du Norit, et ce matin c’est mieux allé de sorte qu’il est de nouveau au travail. Voilà, et moi  j’ai eu un peu de remords de ne l’avoir pas mieux soigné, mon Buby, mais que voulez-vous, je ne supporte pas les hommes saouls. Cette soirée avec les deux jeunes gens m’a seulement fait plaisir en tant qu’elle nous a permis de nous rapprocher d’eux, de faire bonne connaissance, ce qui peut devenir une amitié. Schröder est le secrétaire de M. Jöbsis, et est naturellement au courant de bien des choses. Enfin, je crois qu’ils vont revenir, car ils trouvaient bien heimelig chez nous et que je leur aie fait du café, ils ont trouvé cela chic. J’ai immédiatement pris mes dispositions pour toujours avoir quelque chose dans le buffet, de quoi vite faire un petit souper ou j’importe quoi si l’occasion se présente. Je suis aussi contente pour Buby s’il peut nouer des liens d’amitié avec des jeunes gens pareils, de son milieu et de son éducation. Ce Schröder est avocat, et un esprit très cultivé.
Samedi soir nous avons été au cinéma voir le film du mariage de Juliaantje, (princesse Juliana), et un film américain « Champagne Waltz » qui n’était pas mal du tout. Demain je vais en ville avec Mimi, il y a les soldes dans le plus grand magasin. Quelqu’un que j’aime bien sont ces van der Stock, avec qui nous étions samedi soir, la jeune m’est très sympathique, elle a beaucoup de cœur et nous nous entendons bien.
Jeudi passé, après le cours de gymnastique, j’ai été chez une madame Meyer qui m’avait demandé d’aller boire une tasse de café chez elle, encore avec une madame, une Indische comme la Rickshaw. Je n’avais pas d’excuse valable pour refuser à ces femmes, cela fait que je les ai suivies et me suis embêtée chez elles à ce point que j’en suis revenue malade au point de vomir. Cette Meyer est une hollandaise qui doit sortir d’un milieu très très étroit, et maintenant elle a l’occasion de faire la dame ici, et cette autre m’a tellement rappelé la Rickshaw dans tout ce qu’elle disait et faisait que j’ai été prise d’un dégoût insurmontable. Bon sang, ce que je suis contente d’être à Batavia ! loin de ces nids de mensonges indo. Je sais bien que dans la société européenne ils se disent aussi des mensonges, mais pourtant moins stupides, et de toujours sentir cette méfiance, cette sournoiserie qui te guettent à chacune de tes phrases et de tes expressions. Je vous assure que cela m’embête de retourner à ma leçon de gymnastique parce que je dois rencontrer ces femmes et probablement aussi les avoir après pour une tasse de café, mais après elles peuvent aller se faire…. La madame Bos ici en dessous, elle n’est plus gentille avec moi, parce qu’elle est trop jalouse, mais je ne sais pas, sa jalousie s’extériorise autrement, d’une façon moins canaille, moins sournoise et je peux la lui pardonner, car j’avoue qu’il y a bien de quoi être jalouse de moi, vu que je suis reçue partout et elle presque nulle part.

Mes chers, vu que je suis au bout de la feuille, je vous quitte pour cette fois. Portez-vous tous bien et soyez heureux comme l’est votre Ge… avec mon miston de Buby, mais je l’aime bien, va.



mercredi 17 août 2016




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Batavia

11 janvier 1937

Mes bien chers
J’ai enfin reçu votre lettre et compte rendu de Noël que j’attendais avec impatience. Merci Faaatherli de tout avoir si bien décrit, c’est vraiment comme si j’étais présente en lisant votre journée de Noël, avec la bonne boustifaille. Je pense que vous avez déjà ma lettre décrivant notre Noël à nous, j’ai pensé à vous le soir de Sylvestre à bouffer votre fondue et il m’est venu l’eau à la bouche. Enfin, ce sera pour plus tard, pour le moment je ne peux pas manger de fromage, mais gare quand je serai de nouveau en Suisse.
A Sylvestre j’ai été en ville le matin, acheter et liquider un tas de choses qui ne devaient pas passer le tremplin de la nouvelle année. Oscar est rentré assez tard le soir, nous étions juste à temps pour nous habiller et vers 7 heures, Boy et Mimi (Hausermann) sont venus nous chercher pour aller au cinéma. Nous avons vu « Le grand Ziegfeld » c’est un film qu’il faudra absolument aller voir, c’est beaucoup de revue, de girls, c’est gai, c’est sentimental, c’est triste, c’est rigolo, c’est joli. En sortant à 9 ½ nous avons été au Capitol pour souper. Grâce à nos binettes distinguées, nous avons eu une table des mieux décorées et le manger était exquis. Nous avons chacun pris à la carte, Buby a eu du cochon de lait, avec de la choucroute et un tas de choses avec, Boy a pris un mixed grill, Mimi du poulet froid au jambon d’York et moi des asperges avec un ragoût de cervelle de veau, alors au second service nous avons tous été piocher chez les uns et les autres, ainsi nous avons bien ri et bien mangé, la bonne humeur étant arrosée d’une bouteille de Liebfraumilch ‘29. A minuit toutes les lampes se sont éteintes pour qu’on puisse bien se souhaiter la bonne année. Il va sans dire qu’en France on n’aurait pas pris la précaution d’éteindre les lumières ! Nous avons aussi bu à la santé de tous nos chers, chez moi à raison de un Schluck par personne, et je n’avais pas assez d’un verre ! Pendant tout ce temps la musique a bien joué et après minuit on a entonné das Vaderlandsliederen. L’ambiance montait, montait mais à 1 ½ h nous sommes rentrés, bien contents de notre soirée.
Le lendemain à 11 h réception de Nouvel An chez les Jöbsis (le grand directeur à Batavia). Après avoir salué Mr et Mme J. on est allé rejoindre les autres personnes qui se tenaient par groupes à bavarder et à se souhaiter un tas de bonnes choses auxquelles personne ne croit, pendant que les djongos présentaient les apéritifs et des petits gâteaux. Tout le monde était très agréable avec nous et Mr. J. est même venu s’asseoir entre Annie Elout et moi pendant un moment. A une heure c’était terminé et chacun est rentré.
Le jeudi, vendredi et samedi nous avons eu congé pour le mariage de la Princesse Juliana. Buby a dû travailler à finir de la correspondance pour Bigot avec Elout, et ensuite il a passé deux journées entières sans s’habiller, sans se laver, à lire et à laver des timbres, à les classer etc.  Heureusement qu’il pleuvait continuellement de sorte qu’on ne pouvait pas sortir. Moi j’ai été voir le corso fleuri qui passait devant la maison. Il y avait des autos vraiment très bien décorées, mais dommage qu’elles devaient défiler par une pluie battante. Jeudi soir nous sommes sortis un moment avec les v.d.Stock et avons fait un tour par la ville pour voir les illuminations. Samedi soir, les Lensink nous ont téléphoné pour aller danser, et à 10 heures nous étions à l’hôtel der Nederlanden où il y avait deux orchestres et un monde fou. Le public  n’était pas no 1, mais nous nous sommes bien amusés tout de même. Nous étions 6 et avons dansé, sauté, chanté à n’en plus pouvoir. Il y avait beaucoup d’ambiance. J’avais d’abord mis ma robe du soir, mais sur le conseil de mme Lensink je suis rentrée pour changer et j’en ai été bien contente, car c’était une stunggete . Nous sommes rentrés à 3 heures alors que les Lensink sont encore restés jusqu’au matin. Le troisième couple qui était avec nous, des amis des Lensink, était assez sympatique aussi. Lui est un Indo (un des parents est blanc et l’autre pas) et ressemble un peu à John, mais en plus fin, elle est une petite femme hollandaise. Lui a aussi eu la dysenterie et été très très malade, 3 mois à l’hôpital. Il ne pouvait pas s’en défaire, alors sa mère lui a donné un remède fait de plantes d’ici et maintenant il est tout à fait guéri. Il va me l’apporter aussi et je vais boire ce thé, car j’y crois mieux qu’aux remèdes et tout le poison du docteur, qui m’ont détraqué l’estomac. J’ai demandé l’avis de tante Engel au sujet de ce thé, car elle s’y connaît aussi. Je crois même que le docteur lui-même n’est pas tout à fait contre ces sortes de remèdes indigènes. La dysenterie est une maladie spécialement d’ici, alors il est aussi bon de la guérir par des plantes d’ici. Enfin on verra. Il paraît que ce thé réussit à tuer pour de bon toutes les amibes. Le docteur avait bien dit que je n’en avais plus, mais il ne pouvait pas me l’assurer définitivement et il a dit que si j’en avais de nouveau qu’il faudrait recommencer avec les injections, et cela ne me sourit pas. Je me porte assez bien pour le moment, mais je sens bien que ce n’est pas encore tout à fait parfait. Donc allons-y pour ce thé.
Hier soir nous avons été souper chez les v.d.Stock et ensuite nous avons été à l’église. Ils sont du mouvement Oxford. Nous avons été dans une très jolie église moderne, protestante naturellement, et le pasteur a très bien parlé. J’en ai eu du plaisir et Oscar aussi.
Il y a plus d’un mois que nous n’avons pas eu de nouvelles de papa W. et nous commencions à nous inquiéter quand les v.d.Stock nous ont dit que les Wilde Zwanen (Laren, Hollande, aujourd’hui ce bâtiment fait partie du Singer Museum) étaient en train d’être vendus. Ils ont la nouvelle de leurs parents qui habitent vis-à-vis. Je crois bien qu’ils étaient aussi venus en visite un soir pendant que nous y étions. Enfin, si c’est ainsi, nous comprenons que papa W. n’a pas le temps de nous écrire jusqu’à ce que ce soit passé.
Voici une semaine que ma baboe n’est pas venue, vu qu’elle s’était brûlée au bas du cou avec de la graisse qui a giclé. Elle a une immense brûlure et ne pouvait pas bouger les bras. J’ai eu une remplaçante pendant ce temps, mais elle ne savait pas du tout cuire, alors je m’y suis remise avec un plaisir d’autant plus grand que, pour mon anniversaire de fiançailles, le 5 janvier, je me suis payée deux chic livres de cuisines. Grundregeln durchdachter Hausarbeit et Grundbegriffe zum kochen, braten und backen. Ha ! Cela c’est du radium cette fois. Ces livres s’adressent aux femmes qui ne savent rien du tout de la cuisine et les trois quarts ce sont des images qui expliquent et montrent comment on dit s’y prendre. Epatant. Maintenant je sais quand il faut enlever le couvercle, et quand il faut cuire à couvert ! Je vous vois rire, mais je m’enfiche ! Les conséquences, c’est que j’ai réussi un petit poulet parfait et succulent hier pour dîner. De plus, ce livre te dit un tas de choses simples et essentielles qu’un bon livre de cuisine passe sous silence parce que c’est trop va de soi, une fois qu’on a la pratique de cuire. Enfin, j’y ai toujours le nez fourré et Oscar rigole. Tu sais que la cuisine moderne ne veut plus qu’on cuise les légumes dans l’eau et qu’on jette l’eau ensuite pour encore les cuire dans le beurre.  Non, car ainsi c’est le meilleur qui s’en va. Maintenant on les cuit à couvert avec le reste de l’eau du lavage. Il faut naturellement bien faire attention que cela ne brûle pas, mais au moins les valeurs nutritives restent intactes. Ah, vraiment, pour le ménage les Allemand sont champions. Ensuite viennent les Américaines pour l’Efficiency of the household, mais pas pour la nourriture ou plutôt ils mangent moins simplement, enfin je cherche  le bon milieu.
J’ai reçu des lettres de bonne année de mesdames Köbeli, Danz et c’est tout !  moi qui m’étais éreintée à écrire à un tas de gens qui ont reçu leurs lettres à temps pour Noël. On ne m’y attrapera plus à écrire des journées entières pour toutes ces connaissances. Tu n’auras qu’à leur dire, je pense à eux, mais pour le reste il faut qu’ils aillent se brosser.
Je n’ai pas remarqué que je ne parlais pas de toi en décrivant le film de Sutz. C’est que toi tu es tellement dans l’ombre qu’on ne distingue pas trop bien tes traits, mais la première impression que j’ai eue en te regardant : comme elle est distinguée dans sa tenue et ses mouvements et gestes. Oh, je t’ai bien regardée. Tu serais très très bien si seulement…
Pas terminée, la suite manque


vendredi 12 août 2016




Batavia

29 décembre 1936

Voilà Noël est passé une fois de plus, et vous serez sûrement contents d’apprendre que je l’ai excessivement bien passé. Pour commencer j’ai eu un tout petit moment l’ennui dans l’après-midi du 24. C’est en me rhabillant l’après midi que j’ai commencé à répéter nos chants de Noël, et alors en chantant « voici Noël, ô douce nuit », j’ai tout à coup vu mon Padre près de l’arbre dans la véranda chantant de tout son cœur, de tout sa baffle, alors cela a été le déluge pendant un moment. C’est drôle comme cela peut vous prendre à une simple évocation. Enfin, je me suis bien reprise et j’ai été en ville faire mes dernières emplettes, vu que Buby n’est rentré que très tard. Il avait été essayer une auto que la fabrique de Rangkas voulait acheter. Après souper nous avons fait l’arbre et arrangé la chambre, et le matin de Noël nous avons continué les préparatifs. Comme je n’ai pas de djongos, il fallait mettre la table et faire et arranger ces mille petites choses que nécessite une invitation. Bep m’avait apporté une immense boîte de fondants et un tas de petites choses pour garnir la table, qui en fin de compte était très jolie. Enfin, vers 5 heures nous avons été faire notre toilette et les Bigots sont arrivés avant que nous fussions prêts. J’avais mis une belle robe tandis que Bep n’était qu’en pyjamas. Je trouvais cela un peu drôle d’autant plus qu’ils avaient l’intention d’aller faire une visite d’adieu aux Bos en dessous de chez nous. C’était leur première visite, officielle encore, et Bep, en tant que Mme Bigot, s’est montrée en pyjamas. Je n’en revenais pas, et je pense bien que cela a un peu froissé les Bos.  Enfin, cela ne me regarde pas, mais j’espère bien que cela ne m’arrivera jamais de faire une faute pareille. Quand ils sont venus, nous avons d’abord bu du thé et mangé du Weihnachtstollen. Jan était tout saisi quand nous avons allumé l’arbre à la tombée de la nuit. Mon petit arbre était très bien, j’avais arrangé les branches (Buby plutôt) un peu à la manière des sapins et l’illusion était bonne. Le radio jouait des chants de Noël, c’était comme chez nous. Après un moment j’ai distribué les petits cadeaux que j’avais achetés pour chacun, et sur chaque paquet j’avais écrit quelque chose. Oscar et les deux gosses ont fait flamber de ces bougies étoiles comme nous dans le temps. Quand les bougies touchaient à leur fin, nous nous sommes mis à table, aussi éclairée par une couronne de bougies. Je n’avais fait que du bouillon (qui n’était pas assez fort) et nous mangions des petits pains avec un tas de choses, de la charcuterie, fromage etc. Pour terminer j’avais fait de la crème fouettée avec des œufs et du cognac. C’était heimelig et vraiment dans l’ambiance de Noël. On voyait que Bep tenait avant tout à me faire plaisir en voulant me remplacer ma famille. Elle était vraiment très très gentille et sincère. Ils sont partis à 9 ½ heures déjà à cause des enfants et parce qu’ils étaient tous très fatigués. Comme il me restait encore un tas de bonnes choses à bouffer, Oscar est allé chercher les jeunes van der Stock pour passer un moment de Noël ici, vu qu’ils étaient seuls et que c’est leur premier Noël, au moins pour la jeune femme, ici. Nous avons rallumé l’arbre, causé et grignoté les noix, noisettes etc. Vers 11 heures ils sont rentrés et voilà. Samedi matin nous avons encore été faire une dernière courte visite aux Bigot et ensuite chez les Lensink. Vers trois heures de l’après midi nous avons été à bord avec Elout, Mr. Kleyn de Rangkas et là nous avons rencontré beaucoup de monde de la banque qui venait dire adieu aux Bigot . Le bateau est parti à 4 heures et nous sommes rentrés tranquillement. Le dimanche Oscar a été à Priok (le port) toute la journée pour surveiller un embarquement d’huile et faire des essais sur un débarquement de coprah.  Ils étaient 4 de la Mexolie et ils ont été invités par les officiers du bord à dîner avec eux. Moi j’ai attendu jusqu’à 2 heures avec mon dîner et ensuite j’ai mangé seule et suis allée me coucher. Vers 5 heures, comme il n’était pas encore rentré, je me suis habillée pour aller au ciné car après tout je voulais aussi profiter de mon dimanche et je pensais bien que ce n’était pas seulement le travail qui retenait Buby là-bas. Juste devant la maison, le voilà qui rentre, alors après souper nous avons encore été chez les Hausermann voir leur arbre et bavarder un peu. Hier soir nous avons été jouer au tennis. J’irai aussi jouer le samedi matin maintenant avec un tas de femmes, dont une était l’amie de Bep et qui m’est aussi très sympathique.
Pour mon Noël j’ai reçu un petit vaporisateur à eau de Cologne et j’ai donné à Buby une belle cravate et une ceinture. Nous n’avons pas fait trop de dépenses vu que notre voyage à Keboemen nous a coûté très cher, et Buby doit avoir une nouvelle raquette de tennis ( !!!) sous peu. J’ai tout de même énormément dépensé ce mois-ci, de sorte que nous allons un peu faire ceinture au mois de janvier.
Nous ne savons pas encore si peut être nous allons à Padalarang pour Sylvestre et Nouvel An (à l’ouest de Bandung en altitude). Si nous restons ici, nous fêterons tout tranquillement ici à la maison. J’aime mieux garder l’argent pour m’acheter des robes maintenant que j’ai mon buste, ce sera plus facile. D’ailleurs Buby aura beaucoup à faire ces temps, ils doivent avoir terminé le rapport annuel avant fin février. Buby travaille déjà maintenant tous les soirs en revenant du bureau. Peut être qu’en février il partira pour Banjoewangi qui sera tout près de Bali, on peut s’y rendre en bateau à rames. Je ne sais pas encore si je l’accompagnerai.
Tu me demandes si j’ai déjà porté ma belle robe blanche. Hélas non, je n’ai pas encore eu une occasion vraiment appropriée. Vois-tu, à cette soirée chez Jöbsis, je ne voulais pas être trop bien, il me faut être tellement politique avant, jusqu’à ce que nous soyons bien introduits. Je sais bien que je ne dois rien à personne, mais notre position est déjà assez difficile ici sans que j’y ajoute encore la jalousie des femmes. Mais j’en aurai bien l’occasion bientôt, j’espère, il se peut qu’avec les fêtes du mariage de la princesse (Juliana de Hollande) nous sortions une fois ou l’autre et alors je me ferai belle. Nous en avons eu des congés ces derniers temps. D’abord le Jeune musulman (Ramadan), puis Noël, Nouvel An et les 7 et 8 janvier aussi, sans compter les 9 et 10. On va fêter pendant 5 jours. Toute la ville est déjà décorée et elle sera très bien illuminée.
Pour en revenir à Buby, c’est presque certain maintenant que nous resterons ici, c’est Amsterdam qui le demande même. Bigot a encore reçu une lettre à ce sujet avant de partir. Vous pensez ce que je m’en réjouis, mais tout de même vous comprenez aussi comme cela fait des jaloux, car il faut bien admettre qu’on est poussé un peu plus que les autres, quoique Oscar fait tout pour mériter son avancement, et s’il ne satisfaisait pas je ne crois pas non plus qu’on le favoriserait. Enfin, vous pouvez bien penser combien cela fait des jaloux, car quoique la chose soit discutée dans le courrier personnel de la Banque, il y a toujours des fissures qui mènent la nouvelle au-dehors. Tout ce que je vous écris à ce sujet, il faut le garder pour vous et ne pas aller le chanter, compris Padre ?
Une fois de plus j’arrive à la fin de ma feuille, et c’est de nouveau midi, faut aller surveiller mon dîner.
J’ai vu un Douglas arriver ce matin, peut être qu’il y aura une lettre à midi. Les avions passent toujours exactement au-dessus de notre flat, quand ils arrivent et partent. C’est chic d’être à Batavia !!!














Batavia

22 décembre 1936

J’ai eu tant de plaisir  ta longue lettre de Noël. Elle est arrivée cet après midi avec une lettre de Kitty et je les ai prises avec moi au lit pour les lire tout à fait à mon aise.
Merci de tout coeur pour les belles perce-neige, est-ce que ce sont déjà des nouvelles ou datent-elles encore du printemps passé ? J’ai tant de plaisir aussi à mes pives dont je vais en rouler quelques une dans du asbestos pour les blanchir et donner l’illusion. 


Notre arbre de Noël cette année sera un jeune thuya planté dans une vieille boîte de fer blanc et coupé dans la forme d’un sapin ! Je suis si contente des porte-bougies que tu m’as envoyés, ils sont parfaits pour être fixés à ces branches incommodes. Enfin je me réjouis de fêter Noël. D’abord je n’avais pas grande envie de faire quoi que ce soit, mais voilà que Bep Bigot (Mme Bigot) m’a dit qu’ils viendraient nous dire adieu le soir de Noël parce qu’ils s’embarquent le 26 seulement. Ils ont déjà dit au revoir à tout le monde, tous leurs amis etc. et ont gardé cette soirée de Noël pour nous. Est-ce que ce n’est pas gentil, cela ? Cela m’a tout de suite donné un but pour entreprendre un tas de choses gentilles, telles que faire un arbre, garnir la table, arranger un thé souper etc. Cela fera un vrai Noël et pour les gosses j’aurai de petits cadeaux, en même temps que pour mon grand gosse. Malheureusement un des Bigot, Hans, a mangé quelque chose et a dû se mettre au lit avec de la fièvre, provenant d’une indigestion, et maintenant ils ont peur de ne pas pouvoir venir. Cela m’embêterait bien, mais si c’était le cas, Bep m’enverra l’auto et nous irons avec l’arbre et tout le barnum (toutes ces choses) chez eux. Donc en tous cas nous passerons Noël presque en famille. Je ne peux pas vous dire comme cela m’a touchée qu’ils aient arrangé la chose ainsi alors qu’ils ont pourtant beaucoup d’amis plus vieux que nous, et habitant de grandes maisons etc. Non, ils viendront passer leur soirée de Noël chez nous au flat. Oh, je ne peux pas vous dire comme ils ont été bons pour nous. Je vous ai déjà raconté dans ma lettre précédente comme lui a bien traité Oscar en plusieurs occasions. Vraiment nous avons eu de la chance avec eux, et dire que le 90% de cette amitié dépend de sa première visite à lui à Keboemen qui a décidé de notre venue à Batavia. Et dire que 9 chances sur 10 nous y resterons à Batavia ! Mais chut, encore rien dire là-dessus.
Comment as-tu passé ta fête, Mamms ? J’espère bien gentiment. J’aime beaucoup l’échantillon de ta nouvelle robe et je peux bien me représenter comme la façon doit être distinguée avec tous ces plis cousus. Je suis contente pour toi et contente.
Tu me demandes qui nettoie ma maison et prend soin de mes meubles à Keboemen ? si Wies est si souvent malade ? mais c’est Toemar naturellement. Mon ancien djongos qui est maintenant chez Wies et qui espère revenir chez moi une fois que Wies s’en ira. Et vraiment la maison était bien entretenue. Wies ne fait qu’aller regarder, mais c’est Toemar qui prend soin de tout. Je lui ai donné un pourboire et il riait aux anges quand il m’a dit adieu. Aussi longtemps que les meubles restent là, il ne doute pas que nous retournerons à Keboemen. Oui, je ne sais pas encore ce que nous allons faire de nos meubles. Si nous les vendons nous n’en recevrons presque rien et vraiment c’est dommage, à moins qu’il se présente une occasion. Enfin on verra.
Ta lettre était tellement heimelig, qu’après l’avoir lue je n’avais plus aucune envie de dormir et j’ai été cherché mes livres de chant et j’ai chanté pour moi seule et répété des chants de Noël !
Ce matin j’ai acheté des châtaignes pour fourrer notre caneton pour le dîner de Noël, mais nom d’une pipe, ces châtaignes sont presque toutes pourries, malgré que je les aie payées 60 cents  la livre. J’ai aussi acheté des grosses noix.
Non, je n’ai plus rien entendu de cette traduction à faire pour Mr. Jöbsis. C’est la dépression qui est intervenue et je pense que Mr. Jöbsis a d’autres intérêts pour le moment, peut être que cela viendra encore.
A votre fondue de Nouvel An, vous mangerez chacun un morceau pour moi qui n’ose plus toucher au fromage aussi longtemps que je suis ici aux Indes. Mais tant pis, l’essentiel est que je me porte bien avec cette diète.
Nous ne savons pas encore ce que nous ferons à Sylvestre, peut être que nous irons danser quelque part, ou alors nous ne ferons rien du tout et irons au lit comme si de rien n’était.
Samedi passé, le jour de ta fête en allant lädele (lèche-vitrine), nous avons rencontré le jeune van der Stock qui demeurait à Laren vis-à-vis des Wilde Zwanen (ancienne résidence de papa W.) Il est revenu avec sa jeune femme il y a deux semaines de son congé d’Europe. Ils habitent un tout petit pavillon mais très confortable. Ils sont aussi du Oxford Movement (aujourd’hui Réarmement moral) et je crois que nous deviendrons bons amis (ils le resteront effectivement.)

Mes chers Tous, je ne vais plus faire long feu, je dois encore écrire à Papa W. vu qu’Oscar doit travailler pour Bigot tous ces soirs ci.
Encore une fois, Bonne, bonne et heureuse nouvelle année…..