Keboemen
12 janvier 1935
Mynes
Mamms, chérie unique
Il y a si
longtemps que je n‘ai pas knätschet (papoté)
avec toi cela m’a manqué et je me réjouis de pouvoir le refaire. Je viens de
recevoir vos lettres no 68 et celle
du Padre, et j’en ai eu un grand plaisir comme toujours d’ailleurs. Quand le
moment du courrier approche, c’est comme si on arrivait à bout de souffle, il
faut une nouvelle dose d’oxygène
pour revivre. C’est vos lettres qui font l’effet d’oxygène.
Oh, ce
radio, le plaisir qu’on en a déjà eu, c’est fou. Il marche toute la journée,
depuis le matin à 6 heures. Bien que nous pouvons bien entendre les stations
d’Europe, nous préférons celles d’ici qui sont très bonnes aussi, car il y a
moins de nuisances, que des stations à si longue distance.
Cela ne me
fait rien d’avoir passé le Nouvel An ici, loin de vous mais ce que je regrette,
c’est ce demi litre de chianti, que
Padreli a apporté pour souper, le soir de Sylvestre. Non, c’est un double litre, pas un demi-litre, quels
veinards, va. Oh, je suis si contente que tu aies du plaisir aux deux chiens,
n’est-ce pas que c’est beau de les avoir et de les voir se chamailler. C’est
cette sympathie que tu montres pour ces chiens quand tu écris : Topsy a été
malade, j’avais peur qu’elle claque. J’ai au moins ri une demi-heure après
avoir lu cela.
Fais
attention à toi, surtout avec ces jours de lait, ils attaquent le cœur, si tu
ne me crois pas, demande à Cousine Marguerite, elle le sait. A quoi cela sert
de faire ces jours de lait quand les autres jours on mange beaucoup et surtout
quand on boit 6 choppes en un soir ?
Bon sang !
Je
n’arrive pas à écrire à tout un chacun. Tu comprends, il faut que j’écrive
surtout à ceux qui me répondent, il fait aussi beau recevoir des lettres.
D’ailleurs, je vais restreindre ma correspondance un peu, je vous l’ai déjà
dit, avec toutes ces cartes et lettres que j’ai écrites pour Noël, je n’ai rien
reçu, excepté de vous, St Gall, Fanny et Flock. Oui, la Gässmeli (Mme Gassmann, du Journal du Jura) m’a
écrit une lettre pas trop mal, mais les autres, eh, bien, je vais les envoyer
aux pives, c’est dommage pour tous les sous.
Quant au
radio, Buby dit que cet émetteur est encore trop faible, mais nous allons
essayer tout de même une fois. Notre appareil est tellement sensitif qu’il en
prend beaucoup de ces petits émetteurs, mais ils sont tous trop faibles.
Je voulais
répondre à tes lettres une par une, mais je crains que je n’ai pas assez de
temps, car il me faut encore faire la valise pour partir à midi.
Je me
demande bien ce que tu as encore dans l’idée de me faire. Tu dis que ce n’est
rien pour porter, quoi donc alors ? Je suis curieuse, mais n’est-ce pas tu
ne fais pas un couvre pied pour mes visites. Cela serait dommage pour le
travail. Mes couvre-pieds iront avec moi à Tjilatjap,
je ne voyage jamais sans couvertures, et mon Bettjäckli aussi, et mon beau
cape. Oh, ce qu’il est beau, tu n’as aucune idée. Il me va et me fait belle,
c’est fou. Oscar en a déjà fait des photos, mais elles ont raté à cause de
l’humidité qui nous gâte tous les films ici. Il faudra attendre encore un peu
mais tu en recevras, vas, de tous les côtés et dans toutes les poses.
Une chose
excellente que tu as commencée, c’est la gymnastique. Si tu savais le bien que
cela me fait, je ne pourrais plus m’en passer, tous les matins et tous les
soirs, à peu près 5 minutes. Tu n’as pas besoin de faire des exercices fous,
non, seulement comme tu le fais, bouger les bras, les jambes, et après quelques
temps tu commenceras par aller dans les genoux, après une semaine tu en fera 2,
et ainsi petit à petit, tu gagneras beaucoup d’élasticité, crois-moi. Au
commencement je ne pouvais pas me baisser, mes mains touchaient seulement mes
genoux, et maintenant, sans effort mes mains touchent par terre, mais cela a
duré plus de 6 mois pour arriver à ce résultat. Mais il te faut le faire tous
les jours, ne jamais arrêter. Cela est bien mieux que ces journées de lait.
Crois-y, et dis-moi si tu le fais régulièrement.
Tu as
raison d’accompagner tes hommes au match (de
foot) de temps en temps, le dimanche après midi. Moi j’aimais aussi
toujours y aller, pas tant pour voir jouer que pour voir tout le monde qui s’y
trouvait. C’est gai et intéressant. Et Irma, est-ce qu’elle a l’air heureuse
maintenant ? Bon sang, je pense assez souvent à elle, quel mariage, au
moins le mien est différent, et je ne peux pas assez te répéter combien je suis
contente, de ne jamais avoir eu des histoires pareilles.
Dis, que
penses-tu de Mme Meyeringh. Tu sais,
elle s’est plainte à cause de son mari, qui a dû souffrir sous les ordres de Voskuil, et maintenant il a
démissionné, il quitte la Mexolie. C’est plein d’histoires et elle a vidé son
cœur, et tu penses combien j’ai dû faire attention et me taire et être
diplomatique. Mais tu ne dois absolument rien dire à personne, même pas au
Faaather et surtout la fille Voskuil (vit
près de Bienne) ne doit rien en savoir. Ici personne ne sait encore rien,
seulement moi et Buby. Cela me fait de la peine qu’ils partent et qu’il ne soit
plus directeur, Buby l’aimait bien aussi. Mais n’a-t-elle pas une confiance
illimitée en moi ? Mais n’est-ce pas, tu ne laisses rien sortir de ta
bouche. Tu sais c’est un secret important, je m‘étonne encore qu’elle m’ait
parlé ainsi à cœur ouvert, alors que je ne l’ai vue que 2 fois, c’est
fantastique cette confiance entre femmes. Moi j’ai naturellement bien fait attention
et n’ai rien dit que je ne puisse dire devant n’importe qui.
Tu devrais
voir comme j’ai bonne mine maintenant, mes boutons m’ont presque tous quitté,
grâce aux selles régulières, mais sitôt que je mange poivré, ils reviennent.
Donc, je n’emploie plus du tout de poivre, et je vais dormir régulièrement 2
heures chaque après midi. C’est cela qui fait un bien énorme, est-ce que tu le
fais au moins aussi ? Tu sais on apprend à se soigner ici. Le visage, je
me le lave avec du lait cela me
donne un teint de jeune fille. Je n’ai donc pas besoin de crème etc. Mais cela
on ne peut le dire à personne, je l’ai trouvé seule, et je le garde pour moi.
Il ne faut pas tout dire. Mais le résultat est excellent. A Tjilatjap tout le
monde se maquille beaucoup, mais je ne le fais pas, n’aies pas peur.
Et voilà,
c’est assez pour cette fois, je dois aller faire les valises. Nous ne partons
que pour deux jours mais ici aux Indes, il faut toujours prendre beaucoup
d’habits et du linge, etc etc, je dois encore coudre des boutons.
Porte-toi
bien, prends soin de toi, et sois heureuse en pensant à moi, car ici tout va
bien comme toujours.
Papa W.
nous donne Fl. 300.--, pour notre radio ! Addio !
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