Kediri
20 février 1939
Je viens
de recevoir ce matin les petits tableaux
de l’île de St Pierre et celui du Egge de Terwey (voir who is who). Ils sont ravissants et je vous en remercie mille
fois j’en ai un grand plaisir et je vais immédiatement les faire encadrer. J’ai
également reçu le livre de Von Tavel (écrivain bernois qui écrit en dialecte),
et les jolies photos qui comme d’habitude ont été les bienvenues.
Je n’ai
pas encore eu le temps de lire ce petit livre, car j’ai eu un embêtement après
l’autre ici à la maison. Nous y sommes bientôt depuis un mois et je ne suis pas
encore arrivée à tout mettre en ordre et à organiser le roulement du ménage.
J’ai un fantastique embêtement avec les domestiques. Ils ne
s’entendent pas entre eux, ensuite ils sont malades à tour de rôle, ensuite
il y a ceci et cela de sorte
qu’ils n’ont pas encore été au complet une semaine de suite et avec cela j’ai
toujours les Mogendorff ici encore. Partout j’ai encore du cheni
qui traîne et que je n’arrive pas à ranger. Je n’ai encore jamais eu cela
vraiment c’est décourageant.
Toute la
semaine passée, Buby a été au lit avec une de ses fameuses bronchites de
nouveau. Heureusement que maintenant il va beaucoup mieux, il est retourné au
travail samedi et hier dimanche ils ont aussi passé la plus grande partie de la
journée au bureau et dans la fabrique. Là, cela ne marche pas tout seul non
plus. Enfin, vous voyez, je vous vide mon cœur, j’ai toujours du Gstürm et du
gnusch. (stress et désordre)
Jeudi
passé j’ai été à Soerabaya avec madame
Mogendorrf. Elle a été au docteur et elle
attend un bébé. Elle vomit tout le temps et ne mange pas de tout. On en
rit, mais c’est aussi difficile pour moi de savoir toujours ce qu’il faut faire
faire à dîner, enfin, heureusement que je ne m’en fais pas trop de ce côté là.
Mais vous voyez bien que je n’ai pas la vie trop facile en ce moment. Il paraît
que c’est très difficile d’avoir de bons domestiques ici, ils sont gâtés par
toutes les industries qui fleurissent dans cette partie ci de Java. Ils volent,
ils n’ont pas confiance les uns dans les autres, ils viennent rapporter les uns
sur les autres, ils ne font pas ce que je leur dis, brrr ! Enfin, on en
viendra bien à bout, et il ne faut pas t’en faire si je me vide un peu le
gosier chez toi. Cela me semble déjà moins difficile parce que j’ai pu te
l’écrire.
La maison
que les Mogendorff veulent avoir n’est pas encore libre et maintenant ils ont
décidé d’aller dans une autre maison en attendant, car ils voient eux-mêmes
qu’ils ne peuvent pas rester 4 mois ici chez nous. On s’entend bien et ils ne sont pas sans tact, justement ils
trouvent aussi mieux que nous ne restions pas trop longtemps ensemble. On se
l’est dit ce matin tout à fait amicalement, c’est la meilleure manière de rester bons amis.
Nous avons
enfin reçu une longue lettre explicative de papa W. et sommes bien contents
d’être au courant de tout maintenant.
Comment
cela va-t-il avec Charlot ? j’espère que la grippe ne l’aura pas rendu
trop malade, et qu’il est remis tout à fait.
Merci des
vues de Bienne, je n’ai presque pas reconnu l’hôtel Elite au premier moment. Et
la General Motors (usine de montage pour General Motors,
1935-1975 à Bienne) que je ne connais pas du tout.
L’autre
jour, j’ai eu une courte visite de Mies et Tante Engel. Bon sang, le Totch (sa
fille =bécasse…) n’a pas ouvert la bouche, sauf quand Tante Engel est allée au
cabinet et que moi je n’ai fait aucun effort pour soutenir la conversation,
alors elle a formé sa bouche et elle a pris un élan pour me dire qu’elle avait
sollicité à plusieurs places et qu’elle espérait bientôt pouvoir partir. Je
n’ai rien dit là-dessus, cela ne me regarde pas. Ensuite Oscar est rentré et
elle est restée assise là, sans ouvrir le bec. Mais tu n’as pas besoin d’avoir
peur qu’elle m’ait donné un choc de la voir, je ne suis plus si
délicate !!!
Je ne suis
pas encore arrivée à arranger le costume de Hedy de sorte que je ne peux pas
encore le porter, vu qu’il m’est trop grand. Je me demande quand je pourrai de
nouveau une fois me mettre à la couture tranquillement !
Les
timbres suisses de l’Exposition (Expo
Nationale, Zurich 1939) sont jolis et tout le monde veut me les chiper ici.
Mais Father, tu pourrais en envoyer une série au vieux Engelhart, je crois bien
que tu lui avais promis de lui en envoyer une fois et il n’a encore jamais rien
reçu de toi. Fais-le, stpl.
Je suis
contente que tu aies diminué de poids, tâche de rester ainsi. Vois-tu, moi non
plus je n’ose plus boire d’alcool, et bien souvent j’aurais aussi envie d’un
peu de bière, mais Buby me surveille comme un Häftlimacher (intraduisible = de très près) pour que je tienne mon régime et si
toi tu ne peux pas t’empêcher de manger ce qui t’est défendu, alors tu ne
pourras pas revenir avec moi aux Indes.
Mes chers,
je ne vais pas faire long cette fois-ci. Dis-toi qu’il vaut mieux une lettre
courte que rien du tout. Encore une fois, vous n’avez pas à vous faire du souci
pour nous parce que j’ai vidé mon cœur. Non, nous avons bien des difficultés
aussi bien Oscar à la fabrique que moi à la maison, mais le moral est bon,
quand on a la paix à la maison, les choses de l’extérieur sont supportables
quelles qu’elles soient.
J’ai de
nouveau acheté de jolies petites cuillères à sel et à moutarde, tu les recevras
une fois ou l’autre, et je n‘oublie pas madame Huber, non plus, mais ne vas pas
le lui dire.
J’ai aussi
reçu des Sie & Er de Banely. Comment fait-elle pour me les envoyer ? J’espère
pourtant pas qu’elle les achète spécialement pour moi ? Il ne faudrait pas
faire cela. Si tu lui écris, dis-lui que son petit cadeau a subi du retard, le
type me l’a apporté mais ce n’était pas bien fait et je le lui ai rendu,
maintenant il me faut attendre un mois de nouveau. Dans ma lettre à elle, je
lui demandais des patrons de Vogue (couture), mais dis-lui que maintenant
je n’en aurai plus besoin, vu que j’apprends à faire les patrons moi-même. J’ai
déjà coupé une robe qui me va comme un gant, il reste encore à la coudre Je
suis si contente que je puisse apprendre cela, si seulement j’avais un peu plus
de temps pour m’y mettre.
Madame Mogendorff qui a été si longtemps garde malade, m’a donné le conseil de
boire chaque soir avant de me coucher une cuillère d’huile d’olive pure, que
cela ferait du bien à mes intestins. Je suis son conseil et vraiment je me sens
déjà beaucoup mieux. Il paraît que l’huile d’olive guérit si bien les parois
d’intestins rendus délicats par tous les remèdes. Elle sait beaucoup de choses
et c’est bien pratique de l’avoir dans
le voisinage.
Ce Hoekman est encore toujours en prison, on ne sait pas encore quand
il devra comparaître, mais voilà, on s’habitue à tout, et déjà plus personne
n’en parle. Elle va vite la vie !
Mes bien
chers, …et toi ma Röttelina, toujours les bonnes pensées et le cœur de ta
B….si.
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