dimanche 29 janvier 2017




Tjilatjap

25 octobre 1938

Ma petite Rötteli
Je viens de finir ma lettre à Charlot et celle au Padre, et je m’aperçois qu’il y a encore beaucoup de poids libre, alors j’en profite vite pour écrire à ma sale Rötteli et pour la remercier de sa longue et bonne stämpere no 193.
Comme je te comprends que tu sois contente que la Fanny (sœur célibataire de Rose) ait enfin quitté !  Est-ce qu’elle est liée à St Gall finalement ? Chez cette vieille demoiselle qui lui a payé un mois d’avance ? Oui la chère Banely n’a jamais bien pu tenir en place chez nous, de tout temps elle se croyait certains droits chez toi, et je comprends que cela t’a souvent mis en colère et devant bien des problèmes difficiles avec le Padre par exemple. D’un autre côté, c’est une pauvre diable sans home dont il faut avoir pitié aussi. Tu as raison, qu’elle vienne chez toi pour quelques jours en visite, mais pas plus longtemps, car je te comprends et je t’approuve. Tu n’as pas besoin d’avoir peur, je n’en dis jamais rien ni aux garçons, ni surtout au Padre.
Si tu savais comme tu me fais plaisir en me disant ce que tu désires que je t’envoie ? Je suis si contente de pouvoir acheter quelque chose dont je sais d’avance que tu en auras du plaisir, car c’est souvent bien difficile de choisir des choses dont je ne suis pas sûre que tu en auras beaucoup de plaisir. Tu me connais, j’aime bien te donner tout ce que je peux, j’ai vraiment du plaisir à vous faire de petits cadeaux, mais je déteste dépenser de l’argent quand je ne suis pas sûre que cela fera plaisir, alors je trouve l’argent fiché loin, et cela je ne le peux toujours pas, tu me connais.
Donc tu auras ton bol plus grand. Dois-moi pourquoi tu le veux ? Tu sais ici on les emploie comme saladier : tu peux très bien les laver à l’eau froide. Sitôt que j’aurai ma paye au commencement du mois prochain, j’irai voir ce que je peux acheter dans ce genre. Les petites cuillères que je t’ai envoyées sont en écaille véritable. Je les ai aussi et les emploie pour manger les œufs à la coque.
La Hedy Aeberli est vache de te faire peur ainsi, je crois que si j’avais été là je l’aurais gifflée.
Que la Rötteli ait des fils gentils, aimables et distingués, c’est une chose tout à fait naturelle, puisque elle-même est gentille, aimable et distinguée ! Dommage que les Biennois ne s’en aperçoivent seulement maintenant.
J’ai écrit à la tante Engel que je viendrais donc à Kediri et elle m’a tout de suite répondu avec enthousiasme. Dans ma lettre, j’avais aussi dit que tu t’étais très fatiguée avec toutes les visites que tu avais eues à Sutz, et que tu devais reprendre un repos complet, alors elle me répond que Mies (fille de tante Engelhart) avait aussi reçu une lettre de toi dans laquelle tu disais la même chose !!! Mies est à Paris maintenant, mais elle veut encore venir vous voir avant de quitter pour les Indes ! Je ne sais pas quand ce sera, mais t’en fais pas, je saurai bien m’arranger pour qu’elle ne vienne pas, ici on peut très bien dire ces choses-là. Je dirai que cela te donne trop d’émotion et que ce n’est pas bon pour ta santé.
Ce que tu m’écris de la Raball ne m’étonne pas du tout, quoique cette madame Steiner Schütz peut aussi exagérer, peut être. Mais que les Raball aient des dettes, cela ne m’étonne pas du tout et qu’elle ait la folie des grandeurs non plus. Je veux lui répondre à sa lettre par pure politesse, mais je ne lui laisserai aucune illusion quant à mon amitié pour elle. En voilà une qui ferait tout pour me voler mon mari une fois que j’irais la voir, en Europe, et merci, la vie est déjà assez méchante sans cela, sans qu’on se fasse trahir par de prétendues amies. Qu’elle aille aux pives !
J’ai bien ri de votre beau pic nique, et je suis contente que vous ayez eu du plaisir. Nous aussi avons eu deux beaux dimanches sur l’île Besa Kambamgan (aussi Nusa Kembagan, île devant Cilacap). D’abord avec les Lovius, nous avons fait une merveilleuse promenade le long de la mer, et dimanche passé avec le jeune docteur et sa femmelette qui n’a que 17 ans. Inclus quelques photos.




La Racker Anni c’est un morceau de poison, laisse-la tranquille, ne te laisse plus prendre dans ses griffes, cette vieille chipie.
La Mily en est aussi une comme cela. Je l’avais invitée, mais elle ne vient pas, n’ayant plus d’argent ce mois pour payer son voyage et ce n’est pas moi qui vais le lui avancer. Qu’elle reste où elle est, je n’ai ai pas l’ennui, au contraire, car Buby ne peut pas la sentir. Oui, elle vit comme cela pour son bon plaisir en Fille de bonne famille. Elle ne fout rien, mais va seulement en visite, se laisse gâter par tous les Suisses qui voient encore en elle madame la Consule et c’est tout ( !!!!). Je lui ai déjà dit si souvent de se chercher une occupation, mais elle ne le fait pas, alors je m’en fous, elle n’est pas ma fille. N’ayez pas peur, je ne lui fais pas trop la leçon, je sais trop bien que cela ne sert à rien, chacun doit vivre sa propre vie.
Ma petite Rötteli, c’est le moment de finir, la poste attend. Mille bons baisers. Ici tout va bien mais nous n’avons encore toujours pas de nouvelles de papa W. Sitôt que Loulou sera rentré (de Hollande) dis-lui qu’il m’écrive à ce sujet, car Oscar commence vraiment à s’inquiéter. J’ai reçu une lettre de maman Koningsberger (maman de la mariée) avec des photos de la noce. Elle me dit aussi comme ils ont eu du plaisir à Loulou comme c’était un jeune homme gai, enjoué toujours aimable et si bien élevé ! J’ai reçu une très belle photo de Loulou avec sa dame à la noce. Il est très bien.
Voilà Rötteli mia, un bon muntschi de ta Ge….




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