9 juillet
1934
Keboemen
Mynes
Mamms
Merci
tellement pour ta chère lettre.
Je vois
que tu as de nouveau beaucoup de visites, ma pauvre, mais pour l’amour ne te
fatigue pas trop de nouveau, pense à toi et à moi. Je suis sûre que tu ne
trouves même plus le temps d’aller te reposer entre midi et une heure. Stpl. Ne
te fends pas en quatre pour Brero, il n’en vaut pas la peine. La Fridy est bien
gentille et je suis contente qu’elle soit près de toi, mais je serai aussi
contente quand ils iront demeurer à part, car comme je te connais, c’est toi
qui feras encore le gros travail, c’est toujours sur toi que tout retombe. Bien
sûr, tu n’as plus besoin d’inviter Flock.
Je l’aime bien, Flock, mais tout de même, toi, tu passes avant tout. Donc, ne
prends plus aucune considération, fais tout à fait comme tu veux. Ce que tu me
dis des garçons me fait assez de peine, mais c’était à prévoir. Je vais écrire
à Charlot de nouveau, il a besoin qu’on le supporte, mais sois tranquille, je
ne laisserai jamais rien deviner de ce que tu m’écris à ce sujet.
Est-ce que
la Hanny va se marier maintenant une fois ? Quant à Mottet, je venais de dire à Oscar que j’avais l’impression qu’il
n’était pas heureux, il ne me dit rien de cela dans sa lettre, mais je le
devinais entre les lignes, alors ta lettre est arrivée qui m’a confirmé mon
impression. C’est dommage, cela valait la peine d’être fiancé pendant plus de
dix ans ! En tout cas ce n’est plus par amour qu’il l’a mariée, sa femme
Je le regrette pour lui, mais il n’y a rien à y faire, pas ?
Je pense
aussi souvent à la Mineli Widmer, bah ! c’est sûr, elle est arrivée là (Congo belge) chez son type et a trouvé
la maison et tout déjà installé de sorte qu’elle n’a rien à faire. Une fois que
c’est organisé et que les domestiques savent ce qu’ils ont à faire et comment
on veut qu’ils le fassent, ils travaillent comme des chronomètres, tu n’as
presque plus besoin de t’en occuper, tous les jours à la même heure ils font la
même chose. Ainsi la Mineli n’a rien à faire, je la comprends bien. Pourvu que
son type n’ait pas eu une maîtresse noire avant son mariage. Bah, elle est
encore jeune, si cela ne va pas elle reviendra, il ne faut jamais s’en faire
dans la vie, es chunt doch alles wie nes muess (tout vient comme cela doit).
Cette
semaine qui vient de passer, je me suis faite une combinaison en crêpe de chine
artificielle blanche. Elle n’a pas trop bien réussi, mais tant pis, quand
j’aurai un buste cela ira bien. Demain je vais commencer une autre petite robe
bon marché, toujours pour m’exercer. Les moulures je ne vais pas les défaire
avant que j’aie un buste, alors je pourrai travailler avec précision et faire
de jolies choses. Je vais donc les garder encore quelques temps. A la prochaine
occasion que nous aurons d’aller à Djocja ou à Solo, je vais m’en occuper. Je
pense que je pourrai m’en procurer un pour environ Frs. 15.-- , tu comprends cela me vient meilleur
marché que de le faire venir. Quant à mon chic, ne t’en fais pas, bien que je
ne sois pas toujours à la dernière mode, je ne me laisse pas aller, je suis
toujours bien habillée, avec goût. Tu comprends, ici on ne peut pas suivre la
mode de si près, elle change beaucoup en hiver à Paris, et ici nous n’avons pas
d’hiver, alors je continuerai à faire mes robes d’après les Jardins des Modes
de l’été. Aussi longtemps que je les aurai, tu n‘as pas besoin d’avoir peur.
Quand j’aurai un buste, je prendrai aussi une couturière pour un à deux jours
par mois. Il faut les payer Frs. 2.--
par jour, alors moi je m’occuperai de couper d’ajuster et c’est elle qui
pourra coudre à la machine, car ces couturières ici, n’ont pas la moindre idée
de chic, cela sait tout juste coudre à la machine. C’est juste ce qu’il me
faut, ainsi j’avancerai vite, car de faire les ourlets, et les finissages prennent
du temps.
Ta lettre,
(envoyée de Sutz) je l’ai donc reçue
comme d’habitude, mais quand tu pourras, il vaut mieux l’envoyer depuis Bienne
directement. Merci pour tes conseils pour semer, je vais les suivre.
Jo mynes
Mamali, je connais ton cœur de maman, et tu sais que je te dis tout. Quant à la
Ricshaw, je l’ai amenée où je l’ai voulu, nous sommes maintenant gentilles
l’une avec l’autre quand l’occasion nous fait nous rencontrer, mais nous ne
cherchons pas notre compagnie, elle reste bien gentiment chez elle et moi chez
moi. C’est bien mieux ainsi. Au commencement, je me disais qu’il me fallait
avoir quelqu’un, c’est pourquoi je la laissais venir chez moi et j’allais chez
elle, mais comme ces entrevues ne m’apportaient chaque fois que des colères, il
vaut mieux qu’elles aient cessé. Maintenant tout va bien, elle ne peut plus me
lancer des fions, et moi je n’ai plus à jouer l’hypocrite, bien que je le sois
encore toujours quand nous nous voyons, oh ! c’est sûr, je suis toujours
très gentille, aussi gentille que sa conduite me le permet, mais tu penses bien
que si elle tourne le dos et fait semblant de ne pas me voir, etc, je ne vais
pas lui lécher le cul. J’ai aussi du caractère ! Comme je te l’ai déjà
écrit, je n’ai vraiment pas besoin de compagnie, mon Buby me suffit. Nous
lisons les mêmes livres et ensuite nous en parlons, il est aussi toujours prêt
à m’écouter, à m’expliquer ce que je ne comprends pas, etc. Oh ! non, pour
rien au monde je voudrais changer, je suis si heureuse. Pour le reste tout va bien, la santé
continue à être bonne, j’ai bonne mine aussi et Oscar se porte bien. Il
ressemble tous les jours plus à son papa. Il est devenu tellement homme, on ne
pourrait plus le prendre pour un Buebli maintenant. Ne te fais pas de soucis,
je fais attention de ne pas manger trop richement, mais simple et sain.
Pourvu que
toi tu ne te fatigues pas trop, stpl, prends ton repos après dîner. Et tes
jambes, je pense qu’elles ont recommencé à te faire mal. Tu sais, de temps en
temps j’ai aussi froid aux reins, froid, je ne peux pas me réchauffer, et cela
seulement à une place, c’est très drôle. Moi je pense que tes maux provenaient
plutôt de la sciatique que des varices. De temps en temps la jambe me fait mal,
surtout si je suis restée debout longtemps, une fois ou l’autre à papoter avec
madame V. Alors le lendemain je suis sûre de sentir mes jambes, tout comme toi,
c’est pourquoi je crois que ton mal est aussi de la sciatique, qu’est-ce que tu
en penses ?
Et
maintenant ma mamali chérie, assez pour aujourd’hui et cette semaine, je vais
commencer ma robe et vous en enverrai une photo. Sais-tu déjà l’adresse des
Haury, (Tata et Max, St Gall), la
nouvelle ? Je vais leur écrire pour souhaiter la bienvenue dans le nouveau
logement. Si tu veux un bon conseil, ne les prends pas en vacances, ils sont
trop difficiles, et je t’assure que même s’ils payaient beaucoup, tu n’en
ferais pas de profit mais tu aurais encore des dépenses inutiles, sans compter
les colères, non, sois intelligente et lâche ce projet, subito. Voyons, après toutes les expériences que nous avons déjà
faites, je ne comprends pas que tu reviennes encore sur ce plan. So et
maintenant terminé. Je suis contente que tu n’aies pas l’ennui, je n’en ai pas non
plus, ma vie ici me remplit tellement. La Ricshaw vient de passer ici. Lui,
nous a fait faire une porte pour que les deux petits chiens ne puissent pas
s’échapper. Alors on les a invités pour un apéritif. C’était gentil, tout a
bien été. De cette manière c’est plus facile, quand on ne se voit pas trop,
mais de temps en temps cela ne gêne pas.
God bless
you with all my love, ma chérie
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